À sa publication, ce recueil de poèmes est condamné pour « outrage à la morale publique » et pour « outrage à la morale religieuse ».
Victor Hugo écrit pourtant à Baudelaire : « Vos Fleurs du Mal rayonnent et éblouissent comme des étoiles ».
Sois sage, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici :
Une atmosphère obscure enveloppe la ville,
Aux uns portant la paix, aux autres le souci.
Pendant que des mortels la multitude vile (1),
Sous le fouet du Plaisir, ce bourreau sans merci,
Va cueillir des remords dans la fête servile (2),
Ma Douleur, donne-moi la main ; viens par ici,
Loin d’eux. Vois se pencher les défuntes Années (3),
Sur les balcons du ciel, en robes surannées (4) ;
Surgir du fond des eaux le Regret souriant ;
Le Soleil moribond (5) s’endormir sous une arche,
Et, comme un long linceul (6) traînant à l’Orient,
Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche.
Les Fleurs du mal (1857), Charles Baudelaire
Notes :
1 - Des mortels la multitude vile : la multitude vile des mortels, c’est-à-dire la foule méprisable des hommes.
2 - La fête servile : la fête des hommes esclaves du Plaisir.
3 - Les défuntes Années : les années mortes, passées.
4 - Surannées : démodées.
5 - Moribond : mourant, agonisant.
6 - Linceul : toile dans laquelle on ensevelit les morts.
1. Combien le poème compte-t-il de strophes ?
2. Combien ces strophes comptent-elles de vers ?
3. Comment les rimes sont-elles disposées ?
4. Comment appelle-t-on ce type de poème ?
5. À qui le poète s’adresse-t-il ? Quels sont, dans l’ensemble du poème, les termes qui le désignent ? Quelle figure de style a-t-on ?
6. Quel est le temps et le mode du premier verbe ? Trouvez deux autres exemples dans le poème.
7. Relevez les termes qui désignent le soir. Qu’apporte ce moment au poète ?
8. Par quels termes sont désignés les autres personnages du texte ? Ces termes sont-ils mélioratifs ou péjoratifs ? Qu’est-ce que cherchent ces personnages ? Pourquoi ?
9. La deuxième strophe se termine par l’adverbe « ici ». À quel mot s’oppose-t-il ? Où est-il placé ? Quel effet cela crée-t-il ?
10. Quels termes évoquent le regret ? Qu’est-ce qui est regretté précisément ?
11. Dans l’avant-dernier vers, quel son est répété ? Quel effet est ainsi créé ?
12. Comment faut-il prononcer « l’orient » pour avoir le compte voulu de syllabes ? Trouvez dans le poème un autre exemple.
13. Le poète parvient-il à trouver la paix souhaitée ?
14. Relevez le champ lexical de la mort.
Réécrivez les deux premiers vers à la deuxième personne du pluriel.
Sois sage, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici :