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Faire une dictée par jour qui passionne les élèves

Quand on parle de dictée, et dieu sait qu’on en parle aujourd’hui, force est de constater qu’un modèle s’est gravé dans l’esprit de ceux qui nomment ce pensum venu de la nuit des temps pédagogiques : la dictée, la terrible dictée, celle qui vous vaut de perdre tout espoir d’atteindre la moyenne dès le troisième mot, en un mot la dictée de Pivot. Quelque chose comme ça :

Deux voyageurs, à six heures et demie sonnées, s’étaient étirés dans les couchettes superposées d’une des voitures-lits. Ils s’étaient levés tout titubants et s’étaient fait un brin de toilette avec les moyens du bord. Bien que cela fût malcommode, ils avaient enfilé des jeans et des parkas crème. (in Tests 2001, Devenez un champion en orthographe, Albin Michel)

Pour ma part, j’en ai parlé à plusieurs reprises : Mais comment évaluer cette dictée ? et La dictée encore et toujours, oui mais

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À vrai dire, les choses ont pas mal évolué. Et depuis qu’à l’IUFM on nous disait que la dictée, c’était le mal incarné, le prof que je suis a pu prendre un peu de distance avec ce genre de propos qui nous a conduits à abandonner purement et simplement l’exercice de la dictée. Il faut dire que si c’était pour mettre des 0 à tire-larigot, on pouvait en effet fort bien s’en passer (et puisque dieu sait tout, il sait aussi combien les élèves ont un problème avec l’orthographe). Et c’est ce que l’on fit. Nombre d’enseignants ne font plus de dictées. Je le sais, je l’ai vu. Moi-même, pendant des années, j’ai abandonné sa pratique pour toutes les raisons que je viens de mentionner, mais aussi parce qu’en français, on fait toujours des choix : lecture, rédaction, exposé, etc. On n’a jamais assez de temps.

Enfin bref, venons-en au sujet qui justifie le titre de ce billet.

Une dictée en rapport avec l’actualité

Chaque matin, entre ma tartine et ma tasse de café, sur mon téléphone, je compulse frénétiquement mes flux RSS à la recherche d’un fait en rapport avec l’actualité. Quand un article a retenu mon attention, j’en extrais une phrase ou je résume l’événement afin d’en faire une dictée. C’est donc une simple phrase qui sera soumise aux élèves.
Pourquoi l’actualité ? Parce qu’elle intéresse les élèves, parce que ce rendez-vous quotidien leur rappelle ce dont ils ont pu discuter avec leurs parents en regardant le journal télévisé, parce que cela ouvre la classe sur ce monde qui bouge sans cesse et dont l’école voudrait bien trop souvent s’abstraire. Enfin bref parce que cela les intéresse, et que bien souvent la dictée est précédée ou suivie de questions, d’interrogations sur des choses, des possibilités qui étaient jusque-là ignorées.
De plus, les dictées sont placées sur Evernote et elles sont suivies d’un lien menant à l’article d’où elles proviennent. L’élève intéressé par l’actualité du jour peut en découvrir davantage.

Une seule phrase

Cette dictée est quotidienne. On ne peut donc lui accorder trop de temps, sinon nous ne ferions plus que ça, et ce serait au détriment de tout le reste. Elle ne doit donc durer qu’un quart d’heure. Comment s’y prend-on ? C’est très simple. C’est devenu une habitude et les élèves dès les premières minutes sortent leur cahier de brouillon. Un élève vient à mon bureau et tape la dictée sur l’ordinateur. Quand tout le monde a noté, on affiche la dictée de celui qui écrivait sur mon ordinateur. Ensuite, chacun de lever la main pour signaler les erreurs ou ce qu’il croyait être des erreurs. Et on explique. Quand je dis « on », c’est moi ou le plus souvent les élèves. On explique pourquoi c’est juste ou pourquoi cela ne l’est pas. Tu ne sais pas ? Eh bien on va l’apprendre.
Bien souvent, ce petit travail orthographique est assorti d’un travail typographique : comment fait-on les majuscules ? le « ç » ? Il y a une espace en trop. Il en manque une, etc. C’est que l’exercice du clavier est pour beaucoup d’élèves une terra complètement incognita.

Non notée

Pour finir, je voudrais tordre le cou à une idée reçue qui colle à la dictée, celle de la note. On n’est pas obligé de noter la dictée. Ce travail quotidien est un simple travail, un exercice au brouillon permettant de dire et redire les choses. Par exemple, le passé composé avec son participe passé, comment se termine-t-il déjà ? Par un « i », par un « s » ou « t » ?. Faut-il ou non l’accorder ? Y a-t-il « être » ou « avoir » ? Au brouillon, on peut avoir faux, on peut s’être trompé, on peut se corriger. Rien n’est grave.
Évidemment, la dictée n’est pas le seul moyen d’évaluer l’orthographe. C’est d’ailleurs ce qui se passe au brevet. On l’évalue par la dictée bien sûr, mais aussi par l’exercice de réécriture et enfin par la rédaction. Mais je dis « évaluation » ! Où avais-je la tête ? Qui parle d’évaluation ? Pourquoi veut-on absolument que la dictée soit une évaluation ? L’orthographe ni évaluée ni notée peut rester un travail sur la langue nécessaire, non pas le seul, mais l’un d’entre eux. Et ce serait dommage de le vouer aux gémonies.

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Ces pédagogos qui ont assassiné l’École

L'Instruction publiqueHier, le collège unique rassemblait tous les élèves, tous ! Le cancre et le génie, le feignant et le courageux, le savant et l’inculte, tous rassemblés au mépris des différences, nivelant par là même les aspirations au savoir de générations entières sacrifiées sur l’autel de la soi-disant bienveillance pédagogique et de la diversité. Ladite bienveillance – euphémisme cachant à peine la haine de l’élitisme – ne cherche rien d’autre qu’à détruire l’école. Imaginez une chimère, ce monstre d’hétérogénéité auquel le valeureux enseignant doit faire face, muni de son seul savoir face à l’ignorance érigée en principe, pire, en modèle sociétal.

Le redoublement, retour à la réalité

Plus récemment, les précieuses ridicules du pédagogisme ont battu en brèche le redoublement. Il n’est désormais plus possible de faire redoubler « l’apprenant ». L’élève en difficulté ne peut plus saisir sa chance, et subir l’humiliation douloureuse mais nécessaire de ne pas suivre ses petits camarades partis s’envoler dans les sphères supérieures du savoir. Supprimer le redoublement, c’est surtout une mise à mal du pouvoir de l’enseignant de dire : « Non, tu ne passeras pas » ! Le redoublement, ce mal pour un bien, ce microtraumatisme doit ramener l’enfant à la réalité : « Tu n’as pas travaillé, tu n’as rien fait, tu ne passeras pas ». Pour quelle raison le paresseux n’ayant pas fourni le travail demandé se verrait-il garantir une injuste ascension et nécessairement un jour limitée par la dure réalité des examens et du marché de l’emploi ? Depuis quand récompense-t-on les enfants ayant démérité ? En a-t-on déjà vu qui progressaient en passant dans la classe supérieure ?

Le numérique, nouvel obscurantisme

Et que dire de cette croyance, cet obscurantisme des temps modernes qui voit dans le numérique la solution à tous nos maux ? Comme si cette prétendue panacée allait sauver l’école, comme si fournir de coûteux objets technologiques à nos enfants allait leur permettre de mieux savoir lire, écrire et compter ! L’on voudrait même que des analphabètes n’ayant jamais approché un livre apprennent les rudiments algorithmiques de la programmation ! Marche-t-on sur la tête au pays de l’Éducation nationale ? Il faut qu’au sommet de l’État l’on soit devenu fou pour brandir cette aveugle foi en la technologie, cette mode se réinventant sempiternellement pour mieux vendre, cette fiction éducative agitée par les marchands du temple que sont Google et Apple, ces ogres des temps modernes venus dévorer et nos enfants et nos impôts.

Le baromètre d’une école malade

Aujourd’hui, l’école, menacée de la ruine, une ruine orchestrée par des décennies de réformes, est l’objet d’une nouvelle attaque pédagogique : il ne s’agirait rien moins que d’interdire les notes. La note traumatiserait les élèves ! La note, ce baromètre du niveau déjà bien bas, ne fournirait qu’une piètre indication et ne proposerait aucune remédiation ! Las ! L’on veut supprimer tout instrument de mesure pour mieux cacher la maladie qui s’est emparée du système scolaire. Ainsi, après que la loi Haby a créé des générations entières d’illettrés, on voudrait nous cacher les effets délétères d’une éducation à vau-l’eau. Si la note stigmatise le vaurien, elle récompense fièrement le travail bien fait. Il est vital que notre système scolaire ne soit pas un lieu où le plaisir se loverait comme un serpent en son nid. Il est vital que le travail, cette torture fructueuse de l’esprit, fasse naître devant l’adversité, devant la difficulté, devant l’ennui (oui, l’enfant doit s’ennuyer, c’est essentiel) heur et malheur. Eh ! croit-on tout réussir tout le temps partout ? Croit-on que tout le monde puisse réussir ? Qui voudrait d’une société où tout le monde réussit ? Cette idéologie post-soixante-huitarde où il est interdit d’interdire, qui prône la jouissance et l’absence d’effort doit définitivement être éradiquée. Ou alors la fabrique du crétin aura accouché d’une nation de dégénérés…

Réagissons

Le chant des partisans

Pour cette raison, exigeons la fin du collège unique, rétablissons le redoublement et ne cédons pas à cet appel des Sirènes, ce mirage de bienveillance éducative. Nous n’avons nul besoin de votre numérique que nous laisserons au placard. Armés de nos seules craies, nous vous disons bien haut quelle est l’école que nous voulons et que nous défendrons. Il ne sera pas dit qu’un élève ait passé une journée agréable à découvrir le monde qui l’entoure grâce à une école qui vivrait en harmonie avec la société qui l’anime. L’école est un sanctuaire. L’élève est un moine des temps modernes, il porte un cilice de papier qui lui rappelle chaque jour qu’on n’a rien sans rien. Et l’enseignant, ce croisé antipédagogo, boute la compétence. Il refuse les élèves tous nuls et à égalité. Il prône la culture, le savoir et la transmission, en un mot, le retour à l’Instruction publique.

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Pour un manuel numérique

iPad et manuels
Dressons le décor. Une salle polyvalente d’un collège de banlieue. Un bruit sourd, écho d’un scandale pédagogique. L’inspecteur vient d’annoncer que les manuels pour le nouveau programme de seconde n’étaient pas encore prêts chez tous les éditeurs. L’oreille attentive aura su entendre ces exclamations fugaces : “Mais comment vais-je bien pouvoir préparer mes cours sans manuel?” “C’est bien la première fois que je vais devoir préparer un nouveau programme sans livre”

Mais diable, à l’heure du numérique ; du web 2.0 ; des tablettes et des ENT, voilà que l’absence de manuel scolaire papier semble paralyser un aréopage d’enseignants, pourtant tous capables d’être de fabuleux producteurs de contenus. N’aurait-on pas là le reflet d’un paradoxe inquiétant? Ou alors, ne faudrait-il pas voir dans cette situation, qui prête aussi à sourire, l’occasion d’une salutaire réflexion sur le devenir de cet objet singulier qu’est le manuel scolaire ?

Dont acte !

Ceci tuera-t-il cela ?

Longtemps, j’ai pensé que le débat reposant sur l’opposition hugolienne était infondé, que ceci ne tuerait pas cela, que le numérique ne tuerait pas le papier . Fort de l’idée qu’une technique ne remplace pas une autre (1), j’avais acquis la conviction que le livre tel qu’on le connaît ne serait en rien menacé par le numérique. De ce point de vue, chaque fois que je mets les pieds dans un salon consacré à la littérature, en particulier de jeunesse, je me conforte dans cette idée. Le livre sur papier, joliment relié, avec de belles illustrations ou non, a de beaux jours devant lui. Il n’est que de constater le taux de fréquentation de telles manifestations.

En revanche, je sais maintenant que si l’ordinateur ou la tablette ne tueront pas les livres, ils tueront cependant un certain type de livre. C’est peut-être le cas du livre de poche, c’est à coup sûr celui du manuel scolaire. Cela pour une raison très simple : si le manuel numérique a mieux à offrir que son jumeau de papier, alors l’espérance de vie de ce dernier est menacée.

Cet article écrit à deux pouces, quatre mains, vingt doigts (ou – si l’on préfère – à deux par Ghislain Dominé et Yann Houry), ambitionne non seulement de le démontrer, mais aussi de montrer en quoi cela est possible et souhaitable.

Si le manuel devient numérique

On le sait, le manuel est solidement implanté dans la culture scolaire. Pas une année ne commence sans la distribution de cet objet hautement commercial représentant, selon un rapport de Michel Leroy, 281 millions d’euros pour la seule année 2010. Or le manuel tel qu’on le connaît aujourd’hui – celui-là même dont le coût est si élevé (et encore cette dépense est-elle concurrencée par celle que provoque le nombre croissant des photocopies), ce manuel parfois superbement ignoré par les enseignants sommés de le choisir – finit inéluctablement au rebut.
Abîmé, ne correspondant plus au programme, trop lourd aussi, il doit être renouvelé, modifié, allégé. Sa durée de vie est brève (officiellement elle est de cinq ans environ), et les contraintes, qui ont présidé à sa conception, nombreuses. En effet, l’auteur d’un manuel ne doit pas dépasser tant de pages voire tant de mots, il obéit à une ligne éditoriale ou à un programme, selon des délais parfois excessivement courts, etc. Sans compter que ces manuels sont intrinsèquement pensés, non pour les élèves, mais plutôt pour les enseignants. Ce qui n’est pas sans fâcheuses conséquences : sans aller jusqu’à parler de moteurs de paresse, ces manuels sont vendus aux enseignants comme le nec plus ultra de la ressource documentaire et de la pédagogie, offrant des démarches clefs en main, pourtant bien immobiles et où l’innovation pédagogique est aussi importante que la prise de risque économique…

Or ce sont précisément ces contraintes ou ces défauts qui volent en éclat dès lors que le manuel devient numérique. Il perd son poids. Il met à mal les limites éditoriales et ouvre des perspectives pédagogiques où l’audace est la bienvenue. De plus, devenu intangible, il n’est plus à jeter, il est mis à jour. Il frappe d’obsolescence ou d’inanité la photocopie. Enfin, paradoxalement, il permet d’envisager une réduction des coûts.

Mieux encore, tout se passe comme si le manuel devenant numérique, tel un composé chimique, agissait comme un révélateur, le révélateur d’une métamorphose scolaire. En effet, la publication du manuel numérique – a fortiori d’un manuel libre et gratuit – pose un certain nombre de questions ou plus précisément remet en question un certain nombre de modèles : un modèle économique, mais aussi un mode d’enseignement voire d’enseignant tout court, tant il est vrai que ce rôle est plus que jamais à redéfinir.

Un nouveau modèle économique

Le manuel numérique – donc immatériel, intangible – ne s’abîme jamais, il ne s’écorne pas, il ne s’efface pas. L’élève est même, pour la première fois, invité à écrire, gribouiller, souligner, surligner, annoter son manuel. Ainsi, devenu numérique, le manuel peut devenir possession des élèves. Personnalisable et mobile, il peut être approprié. Faire sien son manuel est une composante essentielle dans le processus d’apprentissage. Tel le moine copiste écrivant dans la marge de son manuscrit ses réflexions et corrections, l’élève peut annoter, corriger et augmenter son manuel numérique. Qu’il cherche à faire cela avec son manuel papier et il aura à rendre des comptes, et à la documentaliste, et au comptable de son établissement.
Évidemment d’aucuns rétorqueront que si le manuel ne se détériore pas, ce peut être le cas de la machine qui le supporte. Force est cependant de constater que certaines tablettes – les iPad pour ne pas les nommer – ont une durée de vie largement suffisante pour accompagner les élèves dans leur scolarité (au moins au collège puisque c’est le niveau qui nous intéresse) (2).

Le numérique permet, non pas l’abandon d’un manuel qui ne correspondrait plus au programme, mais son renouvellement, sa mise à jour. Et il est fortement à espérer que s’il doit être payant, sa mise à jour ne saurait être au même prix ; qu’un simple toilettage ou quelque ajout soit offert à un prix que les collectivités trouveront intéressant au point de préférer le numérique au papier.

Ainsi, c’est tout un modèle économique qui doit être redéfini. Si l’on considère que le papier, ou plus précisément un certain usage du papier, est amené à disparaître, on peut faire le raisonnement suivant. Certes, il faut fournir les tablettes, et cela représente un coût. Mais c’est un coût que l’on doit mettre en regard des 280 millions susmentionnés. Ce coût ne pourrait-il s’amoindrir ? D’une certaine façon, et sans que cela ne relève du domaine de l’utopie, ne pourrait-il sinon disparaître du moins diminuer drastiquement ?

Dans un domaine où l’imprimante et la photocopieuse sont reines, ne pourrait-on envisager leur abandon ? Le numérique permet, en effet, la transmission de données, de sujets, d’exercices en tout genre de façon bien plus intéressante que ne le fait le papier. On pourrait même rêver ceci : aucun enseignant n’aurait plus à se ruer sur la photocopieuse encore en état de marche, celle devant qui deux collègues trépignent déjà, attendant qu’un lève-tôt (ou un retardataire comme les trois autres) achève son collage pour distribuer une photocopie de qualité médiocre (médiocre parce que le numérique a tellement mieux à offrir) ! Songez aux images en très haute définition. Qui peut regretter l’obscure reproduction d’un tableau de maître mal photocopié ? L’abandon des photocopieurs permettrait de consacrer des sommes importantes aux tablettes et aux manuels prévus pour de tels supports. Ajoutons, pour finir, qu’un rapport de février 1986 explique que «le volume des dépenses consacrées aux photocopies est équivalent à la dotation annuelle consacrée à l’achat de manuels» (cité par Michel Leroy), et l’on comprendra que, dans ces conditions, l’achat de tablettes n’est pas le moins du monde inconsidéré. Si, d’aventure, ces manuels sont gratuits (que l’on pense au Manuel de quatrième ou au Livrescolaire.fr), alors, l’argument du prix de la tablette est battu en brèche. S’ils ne sont pas gratuits, ces manuels numériques seront de toute façon, paraît-il, 70 % moins chers.

Si l’on veut ajouter quelque argument consensuel, précisons que c’est au motif de la santé publique qu’a été publiée la circulaire n° 2008-002 du 11 janvier 2008 sur le poids du cartable. On a vu récemment une association de kinésithérapeutes se saisir du problème. Or cela ne doit-il pas rentrer dans le calcul ? Ne doit-on pas se demander quel est l’impact sur la sécurité sociale.

Un modèle économique est donc à redéfinir. Loin de grever le budget, le financement du manuel numérique et de son support peut se faire en utilisant l’argent différemment. Mais, on le devine, c’est aussi un modèle pédagogique que l’on doit repenser.

Vers une pédagogie différenciée

Si l’on se demande pourquoi utiliser un manuel numérique, il faut évidemment se demander ce qu’il apporte au regard de son équivalent de papier. On a vu qu’il était plus léger, qu’il permettait de s’affranchir de certaines contraintes éditoriales, qu’il était plus aisément remis au goût du jour, etc. Est-ce tout ? Ne s’agit-il que de moderniser l’école ? Une école qui a un train de retard dans une société où le numérique est omniprésent ? Je ne le crois pas.

Bien sûr, l’école se modernise, et s’est toujours modernisée. De l’apparition du tableau noir à celle du TBI, du papier carbone au photocopieur en passant par la machine à polycopier à alcool, l’école a toujours accueilli de nouvelles techniques. Hier, le magnétophone, le magnétoscope, puis la télévision, aujourd’hui, l’ordinateur, puis la tablette. En un sens, l’enseignant a toujours été un technophile. Mais toute cette technique ne sert à rien, ou à pas grand-chose, si elle ne s’accompagne d’un changement dans la façon d’enseigner, dans la pédagogie.

Ce seul mot suffit à faire prendre la fuite à des cohortes d’enseignants. Pourtant, quelles que soient leurs exigences, quelle que soit leur vision de l’éducation ou de l’instruction (comme on voudra), aucun ne se refusera à reconnaître qu’il est soucieux de la réussite de ses élèves, de tous ses élèves, pas un ne devant être relégué au fond de la classe à attendre que les heures passent. C’est, de mon point de vue, le grand apport du numérique. Ce n’est pas un supplément d’âme permettant de se dire que l’école est moderne, que l’école n’est pas un îlot ou un sanctuaire (quelle que soit la métaphore que l’on choisisse) sans rapport aucun avec la société qui l’accueille. C’est un outil, un simple outil, un outil que l’on peut débrancher (est-il besoin de le rappeler à ceux que le numérique horripile), un outil qui doit nous permettre de mieux réaliser notre métier ou alors il ne sert à rien.

Il faut se convaincre de cette idée : une technique a une influence sur l’enseignement. Ainsi, le passage de la plume d’oie à la plume de fer a permis d’enseigner aux enfants l’arithmétique plus tôt, la dextérité requise étant moindre avec la plume de fer. Quelles peuvent être, en adoptant des tablettes et des manuels numériques, les transformations pédagogiques ? Eh bien, si cela reste encore à découvrir, je crois que l’informatique permet de modifier notre pédagogie, en la différenciant à moindres frais (3). C’est, par exemple, le cas de la dictée. Traditionnellement, l’enseignant dicte un texte et un seul à la classe tout entière, laquelle s’efforce de le suivre au même rythme. Mais un manuel numérique proposant des dictées permet à l’élève de travailler à son rythme, à son niveau (il n’est pas obligé de faire la même que celle de son voisin, il n’est pas obligé de finir en même temps que son voisin), etc.

En outre, le numérique rend poreuse la frontière entre l’école et la maison. Le travail peut être accompagné. L’élève (ou le parent aidant l’élève) sont susceptibles de bénéficier d’une simple aide par mail. Ce peut être un véritable travail à distance. En effet, le numérique permet l’écriture collaborative. Un élève invité à rédiger un texte ne court plus le risque du hors sujet. Il n’a même plus à se retrouver seul face à une page qu’il ne sait comment remplir, car il est possible de cet élève corriger au fur et à mesure en utilisant un site (4) permettant la rédaction collective d’un texte.

La visioconférence permet de suivre ou de rattraper (en y assistant «en différé») un cours. C’est utile pour l’élève qui se trouve dans l’incapacité de se déplacer (maladie, conditions climatiques), c’est utile pour l’élève qui veut réécouter le cours. Et on trouvera bien d’autres exemples encore ! Naturellement, ce n’est nullement la panacée, la solution miracle, mais on aura au moins pallié certains manques, certaines injustices, etc.

Le manuel numérique, le numérique tout court d’ailleurs, permet donc d’aider tous les élèves et peut-être même de faire que le collège devienne enfin unique, car il ne l’a jamais été, n’en déplaise à ses détracteurs. C’est un rôle nouveau qui est dévolu à l’enseignant. On pourra penser qu’il n’est pas assez payé, et l’on n’aura pas tort. On pourra penser que sa vie personnelle est envahie par sa vie professionnelle, et l’on aura tort. Cela a toujours été le cas, lorsque l’on prépare ses cours, lorsque l’on corrige ses copies. Tout au plus, les choses s’accentuent-elles davantage (5), mais ce rôle gagne en importance.

En fait, après avoir mis l’élève au centre du dispositif scolaire, l’enseignant doit, à son tour, trouver une place centrale, une place qu’internet a fait émerger.

Le rôle de l’enseignant

Nous avons commencé par évoquer le coût phénoménal du manuel scolaire en France. C’est un coût qui pèse sur les collectivités, malgré qu’on en ait, un coût que l’on peut considérer, bien souvent, comme superfétatoire. Ces manuels fort onéreux, délaissés par les uns, portés au pinacle par les autres, ne connaissent qu’une utilisation partielle, une utilisation que ne justifie pas un tel coût. Je ne crois pas connaître un seul enseignant qui l’utilise d’un bout à l’autre, à l’exclusivité de toute autre ressource. La réalité est que, parfois, l’enseignant s’appuie sur tel ou tel manuel, et recompose sa progression pédagogique en glanant çà et là diverses ressources. Ces ressources peuvent provenir des manuels qui envahissent nos casiers lors des renouvellements de programmes. Bien souvent ces ressources proviennent d’internet.

Que constate-t-on ? Que les enseignants bâtissent des sites internet dans lesquels ils proposent leurs propres ressources, que les enseignants réfléchissent à leur pratique sur leur propre blog, échangent leurs idées sur les réseaux sociaux (Twitter, Facebook…), dans de nombreux forums ou listes de discussion. Ces enseignants scannent, prêtent, transmettent, diffusent leurs travaux par ces divers truchements, en conséquence de quoi internet regorge de documents qu’au prix d’une adaptation l’enseignant fait siens. C’est une gigantesque salle des professeurs de toutes les matières, de tous les niveaux, de toutes les nationalités (si la langue le permet). Depuis l’avènement des réseaux sociaux, je n’ai jamais autant côtoyé mes homologues belges, québécois ou marocains.

D’aucuns, et les éditeurs en première ligne, verront ces richesses à travers le prisme de leur profession. Ils regretteront, par exemple, que l’auteur et son autorité, disparaisse, que l’éditeur ne soit plus le garant d’une ligne éditoriale. On va jusqu’à toiser cet afflux numérique, et filant la métaphore aquatique, le qualifiant d’égout.
Ces considérations font de l’intermédiaire entre l’œuvre et le lecteur une nécessité. Or si elle n’a pas toujours existé, elle n’est pas même seulement nécessaire ni souhaitable.

Elle n’est pas nécessaire en ceci qu’un éditeur n’est le garant de rien du tout. Le marché de l’édition présente des dizaines de «chefs-d’œuvre» à lire chaque semaine. On voudrait nous faire croire à la supériorité de ce flot sur celui du numérique parce qu’il a fait l’objet d’un tri, un tri parfois lié à des impératifs mercantiles ? Que dire des vanity press, ces livres vendus à compte d’auteur ? des livres à grand tirage d’une médiocrité absolument inconcevable ? Ont bien été édités des livres erronés, des horreurs de Maurras ou de Céline ! Et que dire de ces ouvrages dans lesquels on trouve coquilles et erreurs faute d’une seconde correction voire d’une relecture humaine !

Et pour le dire franchement, l’éditeur n’est le garant d’un savoir que parce que nous lui accordons toute notre confiance. Notre savoir ne repose pas sur la validation de tel ou tel, mais sur la confiance que nous lui accordons. Ainsi nous croyons dur comme fer que la racine carrée de 2 est 1,414 213 562 373 095 048 801 688 724 209 698 078 569 671 875 376 948 073 176 679 737 990 732 478 462 107 038 850 387 534 327 641 572 7. Pourquoi ? Parce que la communauté scientifique nous l’affirme. Personnellement, c’est une notion que je ne suis pas capable de battre en brèche. Je m’en remets donc à un tiers, que je trouve l’information dans un livre ou sur internet ne change rien.

Elle n’est pas souhaitable en ceci que l’édition ne comprend pas la mutation qui est en train de s’accomplir, et qui, pourtant, s’est déjà accomplie dans l’industrie musicale. Condamnés à reproduire ce qui existe déjà ou à disparaître, les éditeurs s’arc-boutent sur des principes battus en brèche par internet. Les droits d’auteur et autres joyeusetés (les DRM, les Time bombs, etc.) font du manuel numérique un objet peu pratique, qui ne peut s’épanouir dans de telles conditions.
Pire encore ces droits paralysent l’essor, la diffusion, le partage du savoir. Or toute la littérature du Moyen Âge s’est développée hors de ce carcan que la Révolution française, soucieuse de protéger les auteurs, a apporté. Libérant l’auteur du mécénat, il s’agissait de lui donner les moyens de vivre et donc de penser. Elle ne pouvait prévoir qu’elle se ferait confisquer ses plus belles avancées par la rapacité de ces auteurs et de leurs éditeurs lesquels confisqueraient à leur seul profit des écrivains parfois morts depuis près de 100 ans (c’est le cas de Guillaume Apollinaire), quand elle ne fait pas pire…

Que faire de l’éditeur scolaire ? N’est-il pas moribond ? Il n’est plus imprimeur depuis fort longtemps (dès le XIXe siècle pour Louis Hachette). Certains des métiers liés à l’impression ont disparu ou du moins partiellement disparu. C’est le cas de la prépresse, non ? Le livre devenant à son tour immatériel, la PAO touchant le grand public, n’avons-nous pas là les signes d’une mutation inéluctable ?

Dans ces conditions, comment ne pas voir qu’il pèse sur l’enseignant une nouvelle responsabilité, celui de déterminer si telle ou telle ressource trouvée sur internet présente ou non un intérêt, si elle est fiable ou non. Si c’est une responsabilité certaine, elle lui incombe d’autant plus volontiers que du haut de ses cinq années d’études (au minimum), l’enseignant a la capacité de trier, de faire la part des choses dans la masse d’informations que déverse internet.
Voilà comment le lecteur devient auteur, comment il fait autorité. C’est lui qui dira si telle ou telle ressource lui semble fiable ou pas.

Ayant autorité sur sa matière, rédigeant lui-même les manuels (en France ce sont, en effet, des enseignants qui font les manuels), ayant aujourd’hui la capacité de s’autopublier, l’enseignant du XXIe siècle est un professionnel d’un nouveau genre. Au tout début des années 1880, dans le contexte des lois Ferry, on reconnaissait aux enseignants cette capacité de choisir leurs propres manuels. Ce n’était plus du ressort du ministère. Pourquoi ne pas aller plus loin à présent puisqu’il a les moyens de s’autopublier ? L’arrêté du 12 mai 2010 qui explicite les compétences à acquérir par les professeurs ne va-t-il pas dans ce sens ? Il s’agit d’«apprécier la qualité des documents pédagogiques (manuels scolaires numériques ou non et livres du professeur associés, ressources documentaires numériques ou non, logiciels d’enseignement, etc.)».

Pour finir

Ainsi, le manuel sur papier, cet objet onéreux et précaire, en bute à l’essor d’internet, connaît une véritable crise. Cette crise, me semble-t-il, redistribuera les rôles et modifiera notre façon d’enseigner. Plus mobile et plus personnalisé, renouant avec les aspirations de Freinet tout en conjugant le potentiel des nouvelles technologies.
Quant au manuel numérique, fort de tous ses avantages en terme de poids, d’interactivité et de richesse en tout genre, il devrait prendre, à plus ou moins longue échéance place dans les cartables des élèves, dès lors que les camions informatiques (autrement dit les PC de bureau conventionnels) auront été abondonnés au profit des outils mobiles, smartphones, ordinateurs de poche et tablettes. Souhaitons que cela se fasse rapidement.

On ne fera cependant pas l’économie d’une véritable réflexion sur ce que doit être ce manuel. Devra-t-on encore parler de manuel ? N’aurions-nous pas tout à gagner à envisager la constitution collaborative d’un cahier de travaux dirigés ? Cahier produit du travail d’enseignants et de l’élève. A la fois recueil documentaire et témoignage des réflexions de l’apprenant. Lyonel Kaufmann, reprenant ce billet, a esquissé très récemment quelques pistes.

Une question doit se poser également. Quelle entreprise emportera la mise ? Faut-il d’ailleurs qu’une entreprise emporte cette mise ? Google, Microsoft, Apple ont en tout cas bien compris qu’il y avait là un marché (6) à prendre. Je ne vais pas ergoter sur un tel sujet qui excéderait de loin l’objet de cet article, mais, enfin, il faudra bien prendre en compte ceci : l’élégance, la facilité d’usage, l’ouverture et la fiabilité sont les qualités indispensables requises pour convaincre et les pouvoirs publics et les élèves (sans oublier leurs parents) et leurs enseignants. Je ne sais vraiment pas qui, de Google, Microsoft ou Apple, possède la totalité de ces qualités, mais j’ai tout de même une préférence.

Notes :

1 Internet n’a pas tué la télévision qui n’a pas tué la radio qui n’a pas tué la presse…

2 Sans tomber dans l’asservissement ou l’aveuglement publicitaire, force est de reconnaître que l’iPad relègue dans les limbes toutes les autres machines à commencer part les ultraportables faits de plastiques et dont la fiabilité laisse à désirer. Que je sache, l’iPad n’a pas de panne, est solide et son autonomie n’oblige pas les collectivités à modifier les salles de cours pour que tous les élèves puissent se brancher sur le secteur.

3 À moindres frais parce que, sans l’informatique, différencier la pédagogie peut se révéler complexe.

4 Etherpad ou Piratepad par exemple.

5 Et encore ! Je préfère prendre le temps de répondre à un élève par mail plutôt que de découvrir, le lendemain, que tel exercice n’a pas été fait, qu’il n’a pas été compris.

6 On peut regretter que l’école soit un marché, mais c’est le cas. C’est d’ailleurs l’édition scolaire qui, voulant élargir ce marché, l’a compris fort tôt en créant le cahier de vacances. En effet, en 1933, paraissait Loulou et Babette.

Quelques saines lectures :

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Un manuel de français libre et gratuit pour iPad

 
Les deux classeurs

Le manuel de quatrièmeJe me souviens de ce professeur d’histoire qui avait avec lui, en permanence, deux gros classeurs. Je commençais tout juste à enseigner, et ces classeurs m’apparaissaient comme une somme, un véritable trésor, le fruit d’un travail riche d’expériences, de lectures et de recherches, une sorte de Graal auquel tout enseignant devait nécessairement et inéluctablement parvenir après quelques années d’enseignement. J’admirais d’autant plus ces deux classeurs qu’ils me semblaient la matérialisation de ce qui reste d’habitude invisible, le travail de l’enseignant. En effet, les cours de l’enseignant sont parfois intangibles, car ils n’ont pas nécessairement besoin d’être mis par écrit pour être transmis.
Mais ces deux classeurs avaient aussi un côté dérisoire que leur poids et leur encombrement rendaient évident. Pourquoi donc emporter en tout lieu et en tout temps ces deux énormes classeurs ? Ce professeur leur trouvait-il un usage quotidien ? Voulait-il absolument avoir sous la main le document qui deviendrait tout à coup nécessaire à un de ces moments où le hasard pédagogique vous mène ? Je ne sais plus quelle réponse j’ai obtenue à ce sujet, mais je sais depuis que le numérique a achevé de frapper d’inanité ce lourd bagage. Ces deux classeurs tiennent dans un iPad. Or le site Ralentir travaux d’abord, ce manuel ensuite, ce sont un peu mes classeurs, mais je ne voulais pas les garder fermés. Je voulais les tenir à la disposition des autres, pour à la fois les leur offrir et les leur soumettre. C’était à la fois par altruisme et par égoïsme, car, pour plagier Montaigne, je dirais volontiers que votre approbation comme votre condamnation me seront utiles.

Un manuel numérique

Ce manuel n’a pas la prétention de se substituer aux manuels traditionnels. De toute façon, tant que l’on restera engoncé dans l’opposition hugolienne du «Ceci tuera cela», tant que l’on croira nécessaire de choisir l’un ou l’autre, on restreindra sinon la portée du problème du moins la richesse des techniques d’enseignement. Une technique – le plus souvent – ne remplace pas une autre. Internet n’a pas remplacé la télévision, laquelle n’a pas remplacé la radio… L’un ne se substitue pas à l’autre, mais se tient à côté. C’est d’ailleurs tout l’intérêt que je trouve aux tablettes et plus particulièrement à l’iPad. Celui-ci, contrairement à l’ordinateur de bureau, ne trône pas en conquérant sur la table après avoir terrassé les livres et le papier, il se tient à leurs côtés, accompagnant et enrichissant ces supports pluricentenaires. Le bureau du collégien, je le vois avec une tablette et du papier. Ce n’est pas l’un ou l’autre. Pourquoi choisir ?

Ce manuel, je le publie maintenant, parce que la rentrée scolaire ne me permettra plus de lui consacrer le temps que les vacances m’ont permis de lui accorder. Il n’est même pas, si l’on y regarde bien, tout à fait terminé (tant s’en faut). Comme les logiciels libres dont il s’inspire, il correspond à une version bêta, disons une version alpha pour parer à toute critique. S’il n’est pas totalement achevé, il pourra – du fait de sa nature – être mis à jour en un rien de temps. Et j’ose espérer qu’il le sera du fait des contributions, des observations et remarques en tout genre que je vous propose dès aujourd’hui d’écrire ici même dans ces commentaires. Je le redis, et même si ce n’est pas ce qui est arrivé, Ralentir travaux n’a jamais eu vocation à être l’ouvrage d’une seule personne. À ce propos, je tiens à remercier chaleureusement les personnes qui m’ont apporté leur aide, et au tout premier chef Christophe Herlory pour son soutien, sa traduction de l’extrait de Frankenstein et sa relecture du manuel, ma femme qui m’a prêté sa voix pour l’enregistrement des dictées, et tous ceux qui ont pris le temps, pour traquer les coquilles et les erreurs, de lire et relire ce manuel.

S’il n’est pas parfait, s’il n’entend pas supplanter quoi que ce soit – et surtout pas ces si riches manuels que les éditeurs proposent maintenant depuis tant d’années, ce manuel numérique se veut libre de droits, c’est-à-dire que pour la première fois l’on propose à l’enseignant d’être, dans sa classe, totalement en règle avec la loi. On peut copier, modifier, distribuer ce manuel. Les images, les textes, les questionnaires, tout peut être partagé ou transformé. Tout est sous licence Creative commons.

L’empire du copyright

Il faut dire et redire à quel point le droit d’auteur est une plaie pour le monde de l’éducation, un fléau qui restreint drastiquement la diffusion des œuvres. Combien de pépites, de découvertes resteront dans les tréfonds de mon ordinateur et de ceux de mes collègues ? Combien d’ouvrages ne pourront être partagés sous le prétexte que les droits d’auteur ont enfermé la culture pour une vingtaine d’années d’abord (lors de la Révolution française), puis pour cinquante, aujourd’hui pour soixante-dix ans ? Cette confiscation des œuvres, parfois totalement arbitraire (songez à cette traduction du Vieil homme et la mer de François Bon), enferme le patrimoine culturel dans la sphère du privé, prive le public de sa possession, de son droit de reproduction quand ce n’est pas purement et simplement de son droit de consultation. Par désir de profiter d’une manière financière, par crainte du vol également.

Or, dans le cas du numérique, la confusion est totale. Si vous copiez un texte ou reproduisez une image, vous ne volez rien du tout. Vous copiez. Il n’y a pas vol.
J’avais été très étonné en entendant pour la première fois la chanson du copyleft. Copier n’est pas voler. Si je vole un vélo, le propriétaire du vélo est lésé. Si je copie un texte ou une image, personne n’y perd. Le propriétaire n’a pas perdu son texte ou son image, mais, à présent, il y en a deux.

C’est qu’il faut distinguer le bien matériel du bien immatériel. Et, étonnamment, le XVIIIe siècle faisait cette distinction :

«Un homme a-t-il le droit d’empêcher un autre homme d’écrire les mêmes choses que lui-même a écrites le premier ? […] En effet, on sent qu’il ne peut y avoir aucun rapport entre la propriété d’un ouvrage et celle d’un champ, qui ne peut être cultivé que par un homme, et dont, par conséquent, la propriété exclusive est fondée sur la nature de la chose. Ainsi ce n’est point ici une propriété dérivée de l’ordre naturel, et défendue par la force sociale ; c’est une propriété fondée par la société même. Ce n’est pas un véritable droit, c’est un privilège, comme ces jouissances exclusives de tout ce qui peut être enlevé au possesseur unique sans violence.

Tout privilège est donc une gêne imposée à la liberté, une restriction mise aux droits des autres citoyens ; dans ce genre il est nuisible non seulement aux droits des autres qui veulent copier, mais aux droits de tous ceux qui veulent avoir des copies […]»

Condorcet, Œuvres, tome 11

La gratuité, enfin, est un point auquel je tiens. Quand j’ai créé Ralentir travaux, je l’ai fait avec dans l’idée que, pour le lire, je ne demanderai ni inscription ni contrepartie financière. C’est accessible. Instantanément. Je crois savoir que mon travail profite à ceux qui sont loin, dans des écoles mal dotées (mais disposant au moins d’une connexion à internet), à des étudiants étrangers, à des parents désireux de s’informer, à des curieux, et pourquoi pas à des établissements ayant déjà acheté des iPads et qui, compte tenu, de la richesse du web, n’auront pas à payer encore pour y mettre le contenu nécessaire aux apprentissages.

Et puis la remarque peut paraître prétentieuse car émanant de moi seul, mais si l’on veut bien considérer les économies réalisées par les administrations ayant recours à des logiciels libres (que l’on songe à OpenOffice, LibreOffice, Ubuntu…), on se dira que proposer gratuitement des manuels permettra de mettre l’argent ailleurs que dans des CD-ROM ou des manuels qui inévitablement finiront au rebut (c’est malheureux, mais c’est comme ça). Et je refuse d’entendre l’argument rappelant que tout travail mérite salaire. Je veux bien que l’on considère que j’ai fourni un travail de dément pour produire ce manuel, mais je ne peux raisonnablement pas le mettre en vente. Ou alors, pour reprendre une fois encore Condorcet, ce que je vendrais serait mon nom et mes mots, non mes idées qui ont été dites des millions de fois sur internet, dans les manuels, dans les salles de cours, etc.

Pourquoi l’iPad ?

On pourra s’étonner qu’un manuel se voulant gratuit et libre de droits soit proposé sur iPad, et l’on aura raison. Il est difficile de voir en Apple le parangon de l’ouverture et de la liberté. Force est cependant de reconnaître que seule Apple a développé un programme digne de ce nom permettant de produire à peu de frais un manuel numérique digne de ce nom, mais, dès que j’en aurai la possibilité, je m’attaquerai aux autres plateformes afin de proposer le manuel sur d’autres supports. De toute façon, vous trouverez à peu près tout le contenu du manuel sur Ralentir travaux.

Quand j’ai découvert iBooks Author, j’ai vu la possibilité qui m’était donnée de créer facilement et rapidement ce que j’avais toujours souhaité faire depuis Ralentir travaux. Un manuel. Je ne voudrais pas vous faire l’inventaire des avantages du numérique. Je ne vais même pas vous dire ce que contient ce manuel (je vous invite tout simplement à le parcourir. Tout au plus voudrais-je rappeler ces quelques points :

  • La tablette numérique est légère, et permet de se débarrasser du poids du cartable.
    Si la tablette a un coût à l’achat, celui-ci peut être partiellement absorbé par des dépenses qui deviendront superfétatoires (papier, encre, photocopieuse, manuel sur papier…). De plus, tout ce que j’ai acheté chez Apple est durable et solide (je ne suis pas un fanboy, c’est juste comme ça) y compris dans les mains de mes enfants les moins soigneux.
  • La luminosité d’un iPad peut être réglée directement dans l’application, et ne gêne pas les yeux. On peut même lire dans le noir !
  • La police peut être changée, agrandie. C’est, je crois, un atout pour tous ceux qui ont des problèmes de vue. C’en est un également pour les dyslexiques.
  • Mettre des signets, surligner, prendre des notes, tout cela est possible. Chaque mot peut être défini ou renvoyer au web.
  • On trouve des exercices interactifs, des quiz…
  • On trouve également des vidéos, des fichiers audio (un élève peut ainsi faire des dictées seul ou du moins s’entraîner), des diaporamas, des images interactives parfois en haute définition (un jour, on oubliera que la photocopie a existé).
  • Des liens internet menant à Wikipédia ou à Gallica offrent l’accès à de belles éditions quand ce ne sont pas les éditions originales. Une fois encore, j’y vois une libéralisation de la culture. On ne peut certes toujours pas les toucher, mais on peut voir, on peut lire ces œuvres de la Bibliothèque nationale de France que seuls quelques privilégiés pouvaient auparavant découvrir. Et je me souviendrai toujours du regard ébahi d’élèves habituellement peu sensibles au plaisir livresque découvrant des éditions originales.
  • Le manuel peut être utilisé avec d’autres applications. Le Petit Robert, Antidote sont des merveilles sur iPad. Certains logiciels de prise de notes sont extraordinaires. Je ne mets plus les pieds dans une bibliothèque sans mon iPad et Evernote ou Penultimate.

Quelques mots pour finir. Je me suis efforcé de rendre ce manuel aussi complet que possible, de multiplier les exercices de grammaire, de vocabulaire, de rédaction, etc. Il est l’œuvre d’une seule personne (ou presque), et c’est une bien lourde tâche que celle-ci. J’espère que vous saurez vous montrer indulgent quand vous trouverez une coquille, une erreur, une approximation, etc. Je vous remercie de votre compréhension. Un manuel numérique se bonifie dans le temps, non dans la cave, mais confronté à votre regard.

Il me reste à vous souhaiter une bonne lecture. J’espère que vous la trouverez, selon le vieux précepte horacien, utile et agréable.


Mise à jour :
Récemment, j’ai montré la première frise chronologique à mes élèves de quatrième. Avant cela, je leur ai posé quelques questions sur les genres littéraires, l’époque qui a vu fleurir tel ou tel, les grands événements historiques, etc. Je me suis alors rendu compte que leur donner ces repères littéraires et historiques était intéressant et important (j’étais collégien quand on déplorait déjà le manque de repères de la part des élèves), mais je me suis aussi aperçu qu’ils ignoraient complètement qui étaient Newton, Linné ou Pasteur, quand on avait bien pu utiliser l’électricité pour s’éclairer, quand la machine à vapeur était apparue, à quel moment on avait découvert la septicémie…

En somme, il s’agissait de mettre en relation tous ces événements, bref de rendre un peu compte de ce qu’était la vie à telle ou telle époque par le truchement de quelques dates significatives.
Quand la frise précédait un chapitre consacré à un seul auteur, je parvenais encore plus ou moins à brosser une période autour de quelques dates. Malheureusement, pour le premier chapitre, portant sur le XVIIe et XVIIIe siècles, cela peut donner une apparence de fouillis historiques. Le moyen de faire autrement ?

Le manuel a donc connu sa première mise à jour. Pour en bénéficier, iTunes ne vous prévient de rien. Il faut donc supprimer le livre dans iBooks et le télécharger à nouveau.


Deuxième mise à jour :
Le manuel a connu une mise à jour largement plus importante que la précédente. C’est expliqué ici.


Troisième mise à jour :
Cette troisième mise à jour apporte diverses corrections de bugs, oublis, erreurs en tout genre (numérotation de séances, de questions, de formatage du texte, de vidéos, etc.)
Quelques modifications ont également été faites, et quelques exercices ont été ajoutés (notamment sur les propositions subordonnées circonstancielles et sur l’écriture d’un conte réaliste).


Quatrième mise à jour
Cette mise à jour apporte une nouvelle couverture (pour se conformer à celle du manuel de 6e).
Le fichier multimédia d’introduction ainsi que la vidéo « Le masque de la mort rouge » ont été optimisés (le manuel est donc désormais moins lourd).
Ont été ajoutés une séance sur « Le pont Mirabeau » de Guillaume Apollinaire (enfin dans le domaine public), une leçon (vidéo) sur les point de vue, une série d’exercices sur les points de vue ainsi qu’un lien sur « La maison de Gavroche ».
Enfin, quelques erreurs ont été corrigées dans la table des illustrations.

Cinquième mise à jour
Ajout d’un groupement de textes « Victor Hugo et l’injustice »
Ajout d’un sujet d’exposé sur le thème « Vivre au XIXe siècle »
Ajout d’une séance « Jean Valjean chez monseigneur Myriel » (adaptation du texte des Misérables)
Ajout d’une séance « L’accident du père Fauchelevent » (lecture analytique)
Améliorations diverses

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Internet tel que je l’utilise

Paranoïaque ?

Depuis quelque temps, quand j’utilise internet, j’ai le comportement d’un paranoïaque. Je ne sais pas à quoi cela est dû (vraiment je ne vois pas…), mais j’ai une fâcheuse tendance à penser que je ne peux plus faire comme avant, qu’il est temps de changer de comportement.
D’une certaine façon, c’est un peu comme à l’époque où on ne faisait pas de sauvegardes. C’était l’insouciance. Et puis, un jour, il est devenu évident que cela était nécessaire, que si l’on voulait conserver toutes ces précieuses choses que l’on confie à sa machine, il fallait vraiment prendre conscience de la nécessité de les sauvegarder. Pas seulement sur un disque externe quand on veut bien y penser, mais quotidiennement. Une bonne sauvegarde incrémentale et automatique ! Pour ma part, j’en ai deux : une avec Time Machine, une autre avec Personnal Backup. Deux disques durs donc. Et une autre sur internet, car si ma maison brûle, mes sauvegardes également ! Alors j’envoie tout ce à quoi je tiens sur internet. Mais c’est une sauvegarde chiffrée, parce que je ne veux pas que tout le monde puisse intercepter mes données. C’est tellement facile de sniffer le réseau…

Et voilà que je me mets à m’inquiéter de nouveau. Évidemment, on me répondra que pas grand-monde ne s’intéresse aux photos de la petite dernière ou d’ailleurs à tout ce qui m’est personnel. Et, de fait, internet regorge de réflexions de ce genre. Elles pullulent benoîtement : « Je n’ai rien à cacher », « Les VPN servent à cacher que je n’ai rien à cacher », et autres réflexions de ce genre qui justifient toutes les intrusions dans notre vie privée sous le prétexte que nous n’avons rien à cacher.

Pourquoi s’inquiéter ?

Je n’ai donc effectivement rien à cacher, mais c’est encore à moi de déterminer si ce rien doit être exposé ou caché voire exploité dans une base de données à des fins publicitaires. Alors que je me demandais comment chiffrer mes emails, je suis tombé sur cet article expliquant pourquoi nous devrions les chiffrer. L’auteur y explique que, faisant son service militaire dans les transmissions, « les standardistes avaient branché un amplificateur de guitare sur la ligne d’une des cabines publiques »… Et tout le monde de se marrer en écoutant les conversations (voir notamment la partie «Bon, d’accord. Mais qui aurait intérêt à lire mes courriels ? Je n’ai rien à cacher»). Mince alors…

Récemment, la lecture de ces quelques articles a achevé de me convaincre : l’un de Numerama sur les Big Brother conviviaux, l’autre de la CNIL proposant de vous révéler vos traces, un autre enfin de Numerama (encore) sur un rapport de l’ONU non approuvé par la France. Mais, à dire vrai, il n’y a rien de nouveau. Le jour où j’ai découvert tout ce que Google Analytics révélait sur nos visites, j’ai été effaré. Sincèrement, à part votre nom et votre adresse, que manque-t-il ? Je sais combien de temps vous êtes resté sur mon site, comment vous y êtes arrivé, sur quelle page vous avez quitté le site, combien de pages vous avez visitées, je connais votre système d’exploitation, votre navigateur, la résolution de votre écran, la version de flash installé, etc., etc.

Au moment même où j’écris ces lignes, je trouve sans cesse de nouvelles raisons de conforter mon opinion (la neutralité du net en une image, L’internet européen à la carte). Et on se prend à constater que les choses ne sont pas prêtes de s’arranger…

La neutralité du web en une image

Au diable les filtres !

Et il existe encore une autre raison de s’interroger sur la manière à laquelle on accède à internet. C’est lorsque l’on est confronté aux filtres. Qui n’a jamais pesté contre un web filtré ? À en juger d’après les nombreuses réactions ou demandes de collègues, on peut penser qu’ils sont nombreux ceux à qui l’on dénie et le plein accès au web et la capacité à décider par eux-mêmes ce qu’ils peuvent voir et ce qu’ils ne peuvent pas voir.

En ce qui me concerne, je ne comprends pas un traitre mot au discours qui m’est tenu à propos du filtrage du net : dans un établissement scolaire, il s’agirait d’empêcher les élèves (et a fortiori les enseignants) d’accéder à des sites qui n’auraient aucun intérêt pédagogique.

Ah !? Parce qu’il y a quelqu’un, quelque part, sachant ce qui revêt un intérêt pédagogique ou pas ? Parce que moi je l’ignore (je ne parle évidemment pas de tout ce que la morale réprouve et qu’il est plutôt facile de bannir). Peut-on même savoir quel chemin l’activité pédagogique va-t-elle emprunter ? Moi, je fais feu de tout bois : Facebook, Twitter, YouTube, un obscur blog, un improbable site, tel ou tel forum nourrissent ma réflexion et stimulent mon désir d’enseigner. En revanche, quand je tombe sur une page m’expliquant que je n’ai pas le droit d’accéder à telle page parce que quelqu’un quelque part en a décidé ainsi, cela me fait sortir de mes gonds. Je me suis déjà vu à plusieurs reprises refuser l’accès à tel ou tel site parce qu’on avait pensé que ce n’était pas pédagogique. Eh quoi ! Raphaël ou Waterhouse ne seraient pas pédagogiques (si si, ça m’est arrivé) ? Une recherche sur les composants vieillissants de la machine qui m’est confiée est interdite ? Que de fois je n’ai pu voir tel ou tel site parce que le filtrage est mal conçu, parce qu’il est inefficace ? Car il faut bien le constater : on trouve durant sa navigation sur le web ce qu’il ne faudrait pas, et on y trouve pas ce qu’il faudrait…

Au diable les filtres donc !

J’ai alors recherché ce qui me permettrait de naviguer sur internet sans laisser tant de traces. J’ai aussi cherché ce qui me permettrait d’utiliser internet sans avoir à subir les limitations imposées par un administrateur réseau. Il faut dire qu’on en parlait  beaucoup au moment des révolutions tunisiennes et égyptiennes. En 2005, Reporters sans frontières avait à ce sujet publié un très intéressant guide, Le Guide pratique du blogger et du cyberdissident qu’il est temps de ressortir ! Quelque temps avant, Hadopi puis Lopsi soulevaient chez les internautes de nombreuses et légitimes questions.

Donc, de manière générale, je veux pouvoir naviguer sur internet en toute sécurité et privauté, cela de façon privée et sans limitation. Comment faire ? Voici quelques réponses. Mais notez bien que mon objectif n’est pas de vous expliquer le fonctionnement des différents logiciels que je vais évoquer, mais de vous indiquer qu’ils existent, et peut-être de vous inciter à les utiliser.

Firefox

Votre navigateur vous permet-il d’accéder à internet sans avertir la terre entière de ce que vous faites ? Rien n’est moins sûr…
Il me semble que la première des choses à faire est d’adopter la recherche SSL. Tout ce que vous recherchez sur Google est alors chiffré (encrypté comme l’on dit si mal). Ni l’administrateur réseau, ni votre fournisseur d’accès à internet ne pourront (a priori) savoir ce que vous faites (pour en savoir plus sur Google SSL).
Ensuite, je vous recommande Firefox, pour lequel il existe une série de plugins destinés aux plus paranos d’entre nous. On ne présente évidemment plus l’indispensable Adblock qui supprime toutes les publicités intempestives. Précisons au passage que si vous utilisez Hotspot Shield (un VPN gratuit), vous ne serez pas gênés par les publicités qu’il vous impose en contrepartie de sa gratuité.

Parce que certains scripts exploitent des failles de sécurité, NoScript ne permet l’utilisation du JavaScript que sur les sites pour lesquels vous avez confiance, BetterPrivacy se charge des cookies divulguant vos habitudes de navigation, HTTPS-Everywhere est à utiliser pour les mêmes raisons que j’ai exposées ci-dessus à propos de Google, mais cette fois étendues aux autres sites : vous utiliserez https pour tous les sites ou presque (remarquez que Twitter propose cela dans les paramètres).

Je vous conseille donc vivement ces plugins, mais sachez qu’il en existe bien d’autres.

Tor

En plus de tout cela, une solution simple consiste à installer Tor sur votre ordinateur. C’est d’une simplicité enfantine, à condition d’avoir un plein accès à votre machine, et non à un espace alloué sur un serveur avec des droits limités. Et encore ! Si d’aventure vous ne pouvez rien installer sur votre ordinateur, vous avez toujours la possibilité d’utiliser Tor sur une clef USB. Il n’y aucune installation. Juste à déplacer ce que vous aurez téléchargé sur ladite clef (pour le reste, voyez la vidéo sur le dernier lien).
Vous pourrez alors surfer (relativement) anonymement durant votre navigation sur le web et accéder à ce que bon vous semble. Comme on peut le voir grâce à cette capture d’écran, la CNIL pense que mon adresse IP est 80.237.226.74 alors que ma véritable adresse est … (je ne vais quand même pas vous donner mon adresse) , et même que je viens de Hambourg !

 

Les traces selon la CNIL

 

Si toutefois vous avez des difficultés à installer Tor – ou plus exactement Vidalia, voyez le site Journal de bord qui vous expliquera à la fois ce qu’est Tor et comment configurer votre réseau, le proxy notamment (les explications sont destinées aux utilisateurs de Macs, mais vous pouvez sans trop de difficultés les adapter à Windows).

Les VPN

Je vous l’ai dit, je ne vais pas vous expliquer tout cela, sans quoi cet article deviendrait excessivement long. Si vous ne savez pas ce qu’est un VPN (Virtual Private Network), lisez l’article de Wikipédia ou encore Le blog du VPN.

 

VPN (wikipédia)

 

Si vous savez que ce «tunnel» vous permet de naviguer de façon confidentielle, vous voudrez peut-être savoir lequel choisir. Le moins que l’on puisse dire est qu’il y a pléthore. Ce site (béni soit-il) vous propose un large éventail de choix. Certains sont payants, d’autres non. J’ai déjà évoqué Hotspot Shield. Il est gratuit. HydeMyNet semble connaître un certain succès. J’utilise actuellement VPNTUNNEL. En tout cas, le mérite du VPN est certain : si vous voyagez en Chine, si vous voulez accéder à des sites de streaming en anglais, le VPN est fait pour vous (pour 5 $ par mois). Attention, on ne vous autorise pas pour autant à faire du P2P (donc du téléchargement illégal).

Les mails

Chiffrer ses mails n’est pas forcément évident. Cet article vous expliquera tout ce que vous avez besoin de savoir. Le meilleur moyen de le faire est GnuPG, mais ce n’est franchement pas simple à mettre en place.
Il est plus sage d’envisager l’achat d’un certificat (ce que Mail ou tout autre logiciel de messagerie gèrent très bien).

Sur Mac, ce petit logiciel (payant) est fort sympathique et fait très bien l’affaire. Si aucune des solutions proposées ne vous convient, vous pouvez encore plus simplement faire une image avec l’Utilitaire de disque (désolé, c’est encore sur Mac) protégée par mot de passe à envoyer en pièce jointe, dans laquelle vous aurez glissé vos messages.

Utilitaire de disque

Pour finir

Il existe encore de très très nombreuses façons de procéder. Je ne vous ai fait part que des plus évidentes, de celles que j’utilise le plus souvent. Il existe aussi bien d’autres mesures à prendre : protéger sa session par un mot de passe bien sûr, mais il faut aussi penser à la sécurisation des mots de passe avec un logiciel idoine (j’utilise mSecure, mais il y en a d’autres comme 1Password. On pourrait continuer ainsi longtemps ! Pensez à la frêle clef WEP qui protège votre réseau !

Avouons cependant une chose. En prenant les précautions susmentionnées, que ce soit avec Tor ou un VPN, la qualité de votre de débit de connexion s’en ressentira. Vous aurez inévitablement un ralentissement. C’est le prix à payer.

Pour finir, on pourrait aussi se demander d’où vient ce besoin de discrétion sur le web.

J’ai vaguement mentionné le printemps arabe, et l’importance du numérique lors de ce soulèvement populaire, ainsi que des moyens techniques pour contourner les limitations imposées par les gouvernements encore en place à ce moment. Actuellement, sur certains forums, il n’est pas rare de trouver des demandes d’aide de ressortissants français vivant en Chine (par exemple) ne pouvant accéder à des sites comme Facebook. En France,  les récentes lois Hadopi puis Lopsi ont contribué à faire de la France un pays où internet (en tout cas celui que nous connaissons) est menacé. Aussi nombre de gens se sont-ils demandé comment faire pour échapper à des mesures inquiétantes pour leur  vie privée.
À l’époque d’Hadopi, quelqu’un (je ne sais plus qui, c’était dans Le Monde) avait expliqué qu’une telle loi réussirait à déstabiliser un réseau conçu pour résister à une attaque nucléaire. Plus simplement, et mythe fondateur mis à part, il est plus probable que le tout venant (moi en l’occurrence) s’est intéressé à la cryptographie, ce que ne faisait que les gens en danger ou les malfrats…

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Qui fera la part du feu ?

En écrivant cet article sur Céline, j’ai voulu montrer qu’il était nécessaire de montrer (oui, je sais…) que Céline était un grand écrivain, et qu’à ce titre, il était digne d’être célébré, sans que la république n’encourût quelque regrettable flétrissure.

Dans le même temps, j’ai lu çà et que Céline était un immense auteur, mais aussi un sale type, ce qui m’a posé deux problèmes. D’une part, il n’était plus nécessaire de faire la démonstration du génie littéraire de Céline alors que j’ai pourtant souvent lu qu’on lui déniait cette qualité ; d’autre part, il fallait faire un sort à cette accusation biographique réduisant la vie d’un homme à ces deux mots : sale type.

Tout d’abord, l’œuvre. Si elle est géniale, point besoin d’ergoter. Il faut la célébrer en tant que telle. Encore faut-il distinguer l’œuvre littéraire des pamphlets qui sont, eux, absolument illisibles, infects, et n’ont précisément aucun intérêt littéraire.

Ensuite, l’homme. ll faudrait tout d’abord faire la démonstration que Céline est un sale type, ce qui n’est, à mon avis, pas si évident. Et avant même de se demander si l’auteur de Mort à crédit est un sale con, je voudrais qu’on se demande si, avant de lire un livre, on cherche à savoir si l’auteur est un type bien ou non.

Prenons un exemple concret. Ronsard est-il un con ?

Passée l’incongruité de la question, vous vous prêterez comme je l’ai fait à l’exercice, et vous en chercherez un témoignage. Dont acte. Je cite, c’est dans Les Amours :

Je n’aime point les Juifs, ils ont mis en la croix

Ce Christ, ce Messias qui nos pechez efface,

Des Prophetes occis ensanglantés la place,

Murmuré contre Dieu qui leur donna les loix.

Fils de Vespasian, grand Tite tu devois,

Destruisant leur Cité, en détruire la race,

Sans leur donner ny temps, ny moment ny espace

De chercher autre part autres divers endroits.

Jamais Leon Hebrieu des Juifs n’est prins naissance,

Leon Hebrieu, qui donne aux Dames cognoissance

D’un amour fabuleux, la mesme fiction :

Faux trompeur, mensonger, plein de fraudes et d’astuce

Je crois qu’en luy coupant la peau de son prepuce

On luy coupa le cœur et toute affection.

À lire un tel sonnet, je ne pense pas qu’on puisse célébrer les cinq cents ans de la mort du poète en 2085, l’antisémitisme étant trop évident.

Évidemment, je n’ignore pas qu’entre Ronsard et Céline, il y a une différence de taille : le premier n’appelle pas au meurtre (encore que le deuxième quatrain ne me paraît pas innocent). Mais enfin, considérera-t-on un jour que les œuvres du passé sont entachées du poids du passé, un passé insupportable, mais un passé qu’on ne peut refouler, car c’est ce que veut Serge Klarsfeld ; un passé qu’on ne peut censurer (c’est le cas de Tintin au Congo) ; un passé qu’on ne peut réécrire (c’est le cas d’Huckleberry Finn) ; un passé qu’on ne peut ignorer, comme c’est le cas de Jules Verne pour lequel je n’entends nul reproche, et je finirai sur ce sinistre exemple plein d’un racisme aisément circonscriptible à une époque donnée, extrait de L’Île mystérieuse :

Le personnage de Nab est un « Nègre » (p. 16). Il est d’une fidélité canine à toute épreuve (la métaphore est plus que suggérée tout au long du roman) : « Quand Nab apprit que son maître [l’ingénieur Cyrus Smith] avait été fait prisonnier, il quitta le Massachusetts sans hésiter, arriva devant Richmond, et, après avoir risqué vingt fois sa vie, il parvint à pénétrer dans la ville assiégée » (p. 16), ou encore, croyant que son maître était mort, il refuse toute nourriture : « Privé de son maître, il ne voulait plus vivre ! » (p. 32). Quand les rescapés adoptent un singe pour le domestiquer, le serviteur réagit en ces termes :

« – Ainsi, dit Nab, c’est sérieux, mon maître ? Nous allons le prendre comme domestique ? – Oui, Nab, répondit en souriant l’ingénieur. Mais ne sois pas jaloux ! » (p. 135)

Que conclure ? La réponse est difficile, mais je suis persuadé qu’on ne peut pas se débarrasser de la question comme on le fait aujourd’hui avec Céline. La seule question digne aujourd’hui d’être posée est la suivante : l’écrivain qui a écrit ces horreurs sur les Juifs a-t-il pu écrire quelques-unes des plus belles pages de la littérature ?

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Fredo Viola

Je viens de découvrir ou plus précisément de me décider à écouter Fredo Viola. Avec un tel nom, je ne m’étais même pas donné la peine de tendre l’oreille. C’est la lecture de Libération qui m’a incité à le faire, son site proposant cette reprise de Petula Clarck. Si vous aimez, vous pouvez écouter cette chanson sur le site de Télérama ou encore celle-ci sur Vimeo.

Evidemment, je me suis empressé d’acheter son album.

Et si j’achète ma musique, cela ne m’empêche pas de dire que Hadopi, c’est une loi ridicule, inapplicable, ruineuse, rédigée par des ignares pour des ignares. Na !

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Les peintres préraphaélites

lombre-de-la-mort_huntJe viens de découvrir que les préraphaélites étaient des peintres du XIXe siècle, et non des peintres dont l’existence aurait précédé celle de Raphaël. Si, par exemple, l’art précolombien désigne une forme d’art datant d’avant la venue de Christophe Colomb, l’art préraphaélite désigne un courant fondé en 1 848 recherchant la pureté des primitifs italiens prédécesseurs de Raphaël. Étonnant, non ?

Un court article de Wikipédia vous en dira un peu plus.

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Le misérable

Comment peut-on être aussi bête ?

Voulant me débarrasser de dossiers que je jugeais un peu hâtivement inutiles, j’ai supprimé la quasi totalité de mon blog. Rien que ça !

Évidemment, cela n’avait pas d’autre valeur qu’affective, mais ça me chagrine tout de même.

Qu’importe, tout est vanité

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Internet explorer 8

Internet explorer est un piètre navigateur. La version 6 est un désastre encore utilisé, la version 7 est la version actuelle et elle n’est pas mieux. Durant le mois d’avril, elle cédera la place le 27 avril à la version 8 que l’on peut toutefois déjà télécharger ici.

Je ne tiens pas particulièrement à me lancer dans une complainte anti-microsoft, mais il faut bien avouer que ces différentes versions d’Internet explorer tentent de faire oublier combien elles sont déplorables. Cependant, Internet explorer 8 est un net progrès (bien qu’il n’obtienne que 20 sur 100 au test Acid3) : il supporte le CSS 2.1 ! Et, ça me simplifie drôlement l’existence, parce qu’à l’heure où je refais mon site, celui-ci devient pleinement compatible avec Internet explorer. Je précise quand même que là où est un site s’affiche correctement sur pratiquement tous les navigateurs, internet explorer est le seul à poser des problèmes d’affichage. C’est d’autant plus navrant que vous êtes nombreux à l’utiliser pour vous rendre sur Ralentir travaux :

internet_explorer

 

Je ne peux donc que vous inviter à installer dès maintenant la huitième version ou mieux encore à utiliser Firefox, un véritable navigateur digne de ce nom.