Blanche-Neige à Troyes
Nous sommes allés au théâtre de la Madeleine à Troyes le mardi 4 décembre voir "La véritable histoire de Blanche-Neige". Je n’en ai pas parlé parce que je voulais que les élèves le fassent. Malheureusement, le temps venant à manquer, nous n’avons pu travailler à l’élaboration d’un texte complet racontant l’après-midi et expliquant la nature du spectacle vu. En revanche, on a parlé et on a tâché d’expliciter, peu ou prou, ce qui faisait la spécificité de la pièce. Les élèves du groupe 1 de l’atelier lecture ont même eu le temps d’écrire quelques petites choses avec plus ou moins de bonheur et de sérieux.
Ainsi, Clarisse fait observer que le dessin animé de Walt Disney ne rapporte pas la vraie histoire. Elle a donc constaté quelques différences : "Dans la véritable histoire de Blanche-Neige, la reine essaie à quatre reprises de tuer la fillette : avec le chasseur, en l’étouffant, en serrant trop fort le corsage, avec un peigne empoisonné, et pour finir avec une pomme empoisonnée". Elle observe également que "Blanche-Neige se réveille non pas avec le baiser du Prince charmant, mais avec une secousse, elle recrache le trognon de pomme et se réveille. A la fin, on met des souliers chauffés à blanc aux pieds de la sorcière. Elle dut danser avec, jusqu’à ce qu’elle meure".
Les élèves n’ont pas manqué de remarquer que la pauvre Blanche- Neige n’était "pas du tout intelligente". "Quand le chasseur a sorti son couteau, écrit Anna, Blanche-Neige s’est mise à rire […] Elle a mis beaucoup de temps à comprendre qu’elle était en danger.". D’ailleurs, selon Flore, "Blanche-Neige se fait avoir trois fois : avec un peigne, un lacet et une pomme".
Tous ou presque ont ri. "La reine est drôle avec son rire diabolique" écrit Flore. Et Marion d’ajouter "Malheureusement, il n’y a pas sept nains mais un seul qui joue les sept. D’ailleurs ce dernier parle avec un accent suisse, ce qui rend les choses assez drôles".
Pour ma part, j’ajouterai qu’il y a là une performance d’acteur à jouer sept rôles à la fois, ce qui accentue encore le comique de la pièce. Ce "nain" est amusant. C’est en quelque sorte un personnage qui ne devient sympathique que par sa drôlerie : il n’accepte Blanche-Neige que parce qu’elle sera utile dans une maisonnette où la gente masculine l’emporte. Au reste, on le sent à certains moments passablement agacé par l’inaptitude de Blanche-Neige à suivre ses mises en garde contre l’opiniâtre belle-mère. Enfin, j’ai apprécié le dénuement volontaire de la représentation : peu d’acteurs, peu ou pas d’objets. Tout est mimé, chorégraphiv en rythme avec la musique. C’est beau et drôle et cela montre que l’on peut continuer à revisiter quelques classiques éculés de la littérature sans ennuyer le spectateur.
Le renard et l'enfant
Avez-vous entendu parler de ce film Le renard et l'enfant ? Ma fille aînée, oui. Elle voulait voir ce film. Dont acte. Choix étonnant : elle, qui ne jure que par les dessins animés, voulait voir un film !
Je ne sais pas trop au reste à quoi elle s'attendait, mais force est de constater qu'elle n'a pas perdu une miette de ce film qui, d'une certaine manière, revisite le documentaire animalier. C'est assurément un tour de force. Il faut dire que c'est très beau, peut-être trop. Le renard est beau, la fillette est belle, la forêt est belle, la maison est belle. Tout est beau. C'est énervant à la fin. D'ailleurs, le film a été distribué par Walt Disney... ceci expliquant cela… Point de mauvais esprit et reprenons (Voyez tout de même la critique de Télérama). Dans le désordre.
Les lieux sont magnifiques. J'ai suivi le générique de fin et son insupportable chanson et je peux maintenant affirmer avec certitude que le film a été tourné dans l'Ain (à 80 % prétend le site du conseil général de l'Ain) sur le plateau du Retord. C'est bien filmé et la personne (dont j'ai oublié le nom) qui s'est occupée de la photographie a fait un travail remarquable. Je n'y connais rien, mais c'est beau.
Les animaux sont beaux. Et il y en a : renards (Qui l'eût cru ?), lynx, ours, cerf à 10 cors (c'est en tout cas comme ça que je me le représente), lapins, loups, hérissons, oiseaux divers, crapauds et j'en oublie. On aimerait les toucher nous aussi, plonger la main dans ces fourrures soignées et épaisses (pour les animaux à poils évidemment).
La fille est adorable. Elle a une frimousse que ses roux macarons rendent inoubliable. A mon avis, le processus d'identification doit marcher à fond. Elle a d'ailleurs une tenue unique (ou presque) tout au long du film, un peu comme les héros de bandes dessinées ou de dessins animés. Cette petite jouit d'une étonnante liberté et vaque comme bon lui semble dans cette immensité. Il y a bien quelques interdits vite transgressés : à un moment, elle franchit un dangereux cours d'eau qui l'emmène dans d'inquiétants endroits. Il faut se méfier des cours d'eau. Quand on les franchit, on parvient toujours dans des lieux dangereux… Mes élèves me comprendront.
Bref tout est beau disais-je.
On décèle aussi çà et là quelques allusions aux chefs-d'oeuvre du cinéma. Il m'a semblé en reconnaître une : la fillette suivie du renard et de ses renardeaux marchant à la queue leu leu en haut d'une colline, vus en légère contre-plongée, à contre-jour. J'ai pensé au Septiéme seau d'Ingmar Bergman.
A cela, il faut ajouter la doucereuse voix d'Isabelle Caré qui, devenue adulte, fait le récit à son fils de cette amitié étonnante entre l'enfant qu'elle était et l'animal et conclut lourdement et moralement que si les choses ont failli mal tourner, c'est parce qu'elle avait confondu amour et possession. De surcroît, l'ensemble a un rien suranné, ce bon goût du passé toujours un peu sujet à caution (la fillette va à l'école, seule, à vélo, arpentant la campagne).
Que conclure ? Que c'est tout beau avec une moralité à la fin ? Que ce devrait être insupportable ? Eh bien, j'ai trouvé ça très bien peut-être parce que j'étais avec l'une de mes filles et que c'est agréable d'aller au cinéma ensemble. Parce que c'est un conte (avec une charmante comptine que je ne connaissais pas (Pattes à pattes, je crois)) et qu'on y retrouve quelques-unes des terreurs enfantines (à flâner en chemin, on rencontre le loup) et que finalement ça change des superproductions hollywoodiennes que j'irai bien voir par ailleurs. Je pense à A la croisée des mondes.
Ne boudons pas notre plaisir.
Les photos ont été trouvées sur le site d'allocine.com, que je recommande vivement.
Joyeux Noël
Tout est dans le titre...
Eh bien, pas tout à fait... Julien Gracq, cet écrivain publié dans la Pléiade de son vivant, est mort hier. Comme je n'ai pas le temps en cette période de fêtes de révéler l'originalité et la pertinence de ma profondeur de vue sur l'œuvre de l'auteur du Château d'Argol, je me contenterai d'indiquer simplement deux articles. L'un de Pierre Assouline paru dans Le Monde et l'autre de Mathieu Lindon dans Libération.