Sur quels mots ou groupes de mots la négation vous semble-t-elle porter (sur la phrase entière, sur un mot ou un groupe de mots seulement) ? Quelle différence de signification pouvez-vous constater entre les phrases 3 et 4 ainsi que 5 et 8.
Quelle(s) différences(s) remarquez-vous entre ces propositions ? Expliquez.
Rassemblez vos observations et dites, selon vous, comment et par quels moyens s’expriment la négation. Utilisez les exemples que vous avez trouvés ci-dessus pour illustrer vos remarques.
On exprime, en français, la négation de deux façons :
1. De façon lexicale
On peut opposer des termes qu’on appelle des antonymes (des mots de sens contraire) comme petit et grand ou encore pauvre et riche. Ces termes n’ont aucun rapport morphologique. Toutefois, il est possible de créer des antonymes en ajoutant un préfixe (possible/impossible, social/asocial, rangé/dérangé, connaître/méconnaître). C’est ce qu’on appelle la dérivation (1).
On peut encore opposer un même mot à l’aide d’un mot négatif comme pas ou non : un téléphone cher/un téléphone pas cher, la violence/la non-violence, une hypothèse vérifiée/une hypothèse non vérifiée (2).
2. De façon grammaticale
La négation se combine avec un type de phrase (type déclaratif, interrogatif ou injonctif) :
Pour ce faire, on utilise généralement le couple adverbial ne... pas qui est une négation double, c’est-à-dire un ensemble de deux mots composé de la négation ne et d’un deuxième mot qui peut être un adverbe (pas, point, jamais, plus, guère...), un pronom (personne, nul, rien) ou un déterminant (aucun).
En fait, il existe une grande variété de moyens permettant d’exprimer la négation laquelle peut porter sur toute la phrase (négation totale) ou sur une partie uniquement (négation partielle).
La négation totale porte sur la phrase entière et s’exprime au moyen de ne... pas ou ne... point : Il ne parle pas. (cet énoncé s’oppose à la phrase positive Il parle).
La négation partielle porte sur une partie seulement de la phrase. Elle s’exprime au moyen de mots négatifs associés à ne qui permettent d’identifier précisément le ou les groupes de mots visés par la négation. Ces mots négatifs sont :
Toutefois quand la négation totale pas est suivie d’un complément d’objet ou circonstanciel, alors cette négation n’affecte que ce groupe : Il ne parle pas aux élèves de sa classe. Dans cet exemple, la négation ne porte pas tant sur le verbe parler que sur le COI aux élèves de sa classe.
Reste le cas de la négation restrictive qui, formulée à l’aide de ne... que, équivaut à seulement ou uniquement : Alex n’aime que les musiques dansantes. Ce type de négation pourrait être explicité par l’expression et rien d’autre : Alex n’aime que les musiques dansantes et rien d’autre.
Cette négation connaît de très nombreux emplois. Examinons les principaux.
Non peut à lui seul exprimer la négation par opposition à oui notamment dans une réponse à une question :
HAMM. — [...] Ce n'est pas l'heure de mon calmant ?
CLOV. — Non.
(Samuel Beckett, Fin de partie)
Il s’emploie seul et peut éventuellement être renforcé par une conjonction (mais) ou une interjection (ah) :
NAGG. — Tu dormais ?
NELL. — Oh non !
(Samuel Beckett, Fin de partie)
Non peut aussi s’insérer à la fin d’une phrase pour la renforcer : Ça doit être bien difficile de choisir, non ? (Pierre Lemaitre, Couleurs de l'incendie)
Il peut occuper la fonction de COD (Il a dit non) voire remplacer toute une proposition subordonnée complétive ([...] il m’a demandé si cela m’ennuierait de le faire tout de suite et j’ai répondu que non., Albert Camus, L'Étranger).
Il peut opposer deux groupes : Je prendrai le métro et non ma voiture, Le participe passé s’accorde avec le COD antéposé, non le sujet...
Associé à plus, il reprend les éléments d’une proposition : Vous ne le voulez pas, ni moi non plus. Associé à l’adverbe seulement, il exprime une gradation : Dans ce siècle, je suis le premier qui ait parlé non seulement de l’âme des animaux, mais encore de l’âme des choses. (Victor Hugo)
pas (comme point d’ailleurs qui apporte une couleur archaïque ou littéraire) s’emploie avec ne pour indiquer une négation totale : Je ne comprends pas ce que tu veux.
Toutefois, pas peut être employé sans ne, mais contrairement à non, il ne peut s'employer seul. Il doit être complété par un autre mot :
Marc. Tu te fous de moi !
Serge. Pas du tout.
Yasmina Reza, Art
VLADIMIR. - on ne t'a pas battu?
ESTRAGON. - Si... Pas trop.
Samuel Beckett, En attendant Godot
On peut aussi employer la négation pas dans une phrase averbale avec un simple groupe nominal : Pas le temps ! ou un adjectif : Pas terrible !. Un pronom : Pas lui !. Un adverbe : Pas maintenant...
Ne s’emploie avec un deuxième élément négatif : ne... pas, plus, guère, jamais, que.... Toutefois, l’élément ne est souvent omis à l’oral (Je sais pas au lieu de Je ne sais pas).
Par ailleurs, il arrive qu’on emploie ne seul après certains verbes suivis d’un infinitif : Je ne saurais répondre, Je n’ose le dire ou après un si exprimant l’hypothèse : Si je ne m’abuse, Le sucre serait trop cher, si l'on ne faisait travailler la plante qui le produit par des esclaves. (Montesquieu, De l’Esprit des Lois).
Enfin, de nombreuses tournures s’utilisent avec ne seul. Une question avec que (au sens de pourquoi) : Que ne le disiez-vous plus tôt ?. Une question rhétorique : Qui n’approuverait ?. Une proposition subordonnée : Il n’y a personne qui sache cela, etc.
La conjonction de coordination ni sert à coordonner des groupes négatifs de la même façon que la conjonction et coordonne des groupes positifs : Je veux du fromage et du dessert. / Je ne veux ni fromage ni dessert.
ni peut donc coordonner des groupes nominaux mais aussi des propositions entières : Il ne peut ni accepter cette proposition ni la refuser ou encore des verbes : Je ne parle ni ne lis l’allemand (en ce cas ni est renforcé par ne).
Faites précéder chacun des mots suivants du préfixe « in- » ou « a- ».
Capable, régulier, logique, mature, normal, mobile, recevable, politique, lettré, achevé, réel, typique, lisible, acceptable, symétrique, mangeable, social.
Faites précéder les mots suivants du préfixe « dé- » (« dés- ») ou « mé- ».
Faire, dire, content, plaisant, approuver, organisé, prendre, ordonné, fier, priser, estimer.
Dites si les négations des phrases ci-dessous sont totales ou partielles.
lettré, normal, dire, approuver, responsable, patient, brancher, content.
la violence, des personnes averties, un livre intéressant, Cet individu est coupable, Ce plat est froid, Il est tôt, Cet argument est recevable, grand.
Notes :
1 - Il existe de très nombreux préfixes négatifs : a-, anti-, dé- (ou dés-), dis-, dys-, in-, mal, mé-. non. Voir entre autres la leçon sur les préfixes « in » et « a » ou encore cet exercice sur le préfixe « in ».
2 - Devant un nom, non est suivi d’un trait d’union (la non-violence, un non-événement). Mais devant un adjectif ou un participe passé, on n’en met pas (non coupable).
3 - On qualifie d’explétifs les mots qui, dans certains emplois, n'ont ou ne semblent avoir aucun rôle grammatical dans l'énoncé où ils apparaissent.
Le ne explétif ne traduit pas réellement une négation, mais plutôt une éventualité exprimée surtout par le verbe.
4 - Voir le portrait de Quasimodo dans Notre-Dame de Paris.