Lecture analytique du « La rose et le réséda » Louis Aragon
Ce long poème composé de vers de sept syllabes (heptasyllabe), sans strophes ni ponctuation, au rythme binaire (voir les rimes en [el] et en [a]) oppose deux personnages, l’un qui croyait au ciel, l’autre qui n’y croyait pas. Cette opposition est rendue évidente par le refrain revenant tous les quatre vers. Le refrain montre que ce poème ressortit au genre de la chanson.
Le refrain repose sur une double périphrase qui désigne le croyant (« Celui qui croyait au ciel »), et l’athée (« Celui qui n’y croyait pas »). Enfin, on remarque la répétition du pronom démonstratif « celui » qui, placé au début de chaque vers du refrain, constitue une figure de style appelée l’anaphore, renforçant l'idée qu'il y a d'une part le catholique et d'autre part l'athée.
Différents termes (« des soldats », « combat », « citadelle » et « sentinelle ») indiquent que le poème se passe pendant la guerre, la seconde guerre mondiale. Plus précisément, le poème évoque la résistance, ce qu’indique le terme «rebelle», et ce que confirme la dédicace à Gabriel Péri et Estienne d’Orves (deux catholiques) ainsi que Guy Moquet et Gilbert Dru (deux communistes), tous fusillés par les nazis.
« La rose et le réséda » est un poème dans lequel Louis Aragon appelle le croyant et l’athée à résister ensemble et non séparément. Il s’agit de défendre la France (« la belle/Prisonnière des soldats ») qui est représentée sous la forme d’une allégorie. Cette allégorie se poursuit quelques vers plus bas : « Quand les blés sont sous la grêle », c’est-à-dire quand l’époque est difficile. C’est cette allégorie qui donne le sens du poème : « L’alouette et l’hirondelle/La rose et le réséda ». Ces deux oiseaux, ces deux fleurs représentent les deux personnages opposés qui doivent s’unir pour lutter contre l’envahisseur. L’appel à l’unité est rendu évident par les termes ou expressions « même », « tous les deux », « commun », « un seul glas », etc. Louis Aragon invite les hommes à combattre ensemble quels que soient leurs divergences d’opinion, car « Un rebelle est un rebelle » et leur sang rouge est le même. Le présent de vérité générale souligne l’idée que ce ne sont pas les idées qui prévalent, mais la résistance et l’union dans le combat.
Le poème s’achève sur l’idée que «le grillon rechantera», que la guerre s’achèvera sur un nouveau printemps (« raisin muscat », « framboise », « mirabelle », « grillon », « alouette », « hirondelle »). Mais sans le sang, le sang des résistants qui se mêle à la terre et la nourrit, il n’y aura pas de « saison nouvelle », pas de rose et de réséda.
Le texte s’achève donc sur le vers qui donne son titre au poème. Les fleurs sont des symboles qui, par leur couleur, évoquent une dernière fois le communiste (couleur rouge) et le catholique (couleur blanche), morts pour la France (ce qui explique pourquoi le poème est essentiellement écrit au passé).