Les genres exploités par les mouvements réaliste et naturaliste sont le roman et la nouvelle (et parfois le conte).
Le conte et la nouvelle sont des récits courts, contrairement au roman.
Le terme désigne un récit court écrit en prose.
Le mot « nouvelle » est emprunté à l’italien novella et signifie « récit imaginaire ». Il vient de l’écrivain Boccace et de son ouvrage Le Décaméron (œuvre constituée de cent récits répartis sur dix journées). « nouvelle » est alors employé au sens de « récit concernant un événement présenté comme réel et récent ».
Au Moyen Âge, Le Décaméron est un succès littéraire qui fournit le modèle d’un genre qui remplace d’autres récits courts comme le fabliau ou le dit (qui étaient en vers). Les Cent Nouvelles nouvelles ou L’Heptaméron de Marguerite de Navarre en sont les exemples les plus connus.
Notez que l’anglais « novel », repris lui aussi à l’italien « novella » (au XVIe siècle), a évolué vers le sens de « roman » (au XVIIe siècle). Le sens de « nouvelle » est traduit par l’expression « short story ».
Dans une nouvelle, le récit est généralement centré autour d’un seul événement et les personnages sont peu nombreux. Charles Baudelaire écrit dans L'Art romantique, à propos de la nouvelle : « Son effet est plus intense ; et comme le temps consacré à la lecture d'une nouvelle est bien moindre que celui nécessaire à la digestion d'un roman, rien ne se perd de la totalité de l'effet. »
Maupassant utilise souvent le mot « conte », comme dans le recueil Contes du jour et de la nuit.
Le mot « conte » vient du latin « computare » qui a donné à la fois « compter » et « conter ». Le lien entre ces deux mots peut être rappelé par le mot « comptine ».
Il y a le conte merveilleux ou encore le conte philosophique. Il existe aussi le conte réaliste, qui se fonde sur la réalité. À la différence du conte merveilleux, il est ancré dans le réel. Il n'y a aucun merveilleux (ni objets magiques ni sorcières). Il est centré sur un fragment de vie (cf. « La parure ») ou une anecdote (« Le crime au père Boniface »). Les histoires sont presque toujours tirées de la vie quotidienne la plus banale et les personnages (malgré quelques exceptions) nous ressemblent et n'ont donc rien d'exceptionnel ou d'anormal.
Le conte réaliste suit les étapes du schéma narratif avec un début (situation initiale) et une fin (situation finale) qui est souvent une chute, c'est-à-dire une fin qui provoque la surprise (voir encore « La parure »). De même que pour la nouvelle, la brièveté du conte donne toute son intensité à l'histoire.
Les contes de Maupassant mettent en scène peu de personnages (comme dans « Une vendetta » ou « Le gueux »), mais qui sont fortement caractérisés (le narrateur précise la psychologie du personnage et ses émotions). Ils sont issus des classes moyennes ou populaires (paysans, employés de bureau, bourgeois...). Sont décrits les villes, la campagne, les fermes, les boutiques de commerçants, les maisons... Sont abordés les thèmes du travail, de l'argent, de la souffrance, de la vengeance…
Les contes de Maupassant sont d'abord publiés dans la presse. Leur forme brève leur permet de paraître en une seule fois dans un journal.
À l’origine, le roman désigne un ouvrage écrit en langue romane, qui est la langue parlée dans le Nord de la France au XIIe siècle. En ce sens, le mot « roman » désigne donc d’abord une langue (l’ancien français) puis, par métonymie, le livre écrit dans cette langue : un roman est un ouvrage écrit en roman.
C’est à cette époque que la littérature romanesque médiévale (celle de Chrétien de Troyes, par exemple) se développe et raconte les exploits de héros chevaleresques comme Yvain ou Perceval. Cette littérature n’a rien de réaliste et renvoie une image idéalisée de la noblesse à laquelle elle s’adresse. Le roman tient alors davantage du poème puisqu’il est écrit en couplets d’octosyllabes à rimes plates (aa, bb, cc, etc.). Il est destiné à être lu à voix haute car seuls les clercs (= l’homme d’église, du latin ecclésiastique clericus qui a donné clergé) ont cette connaissance.
Aujourd’hui, nous définirions plutôt le roman par opposition à la nouvelle. C’est donc un récit long, en prose (ce n’est donc pas de la poésie) relatant une histoire fictive (mais qui peut s’inspirer de la réalité, d’anecdotes réelles…).
Il existe toutes sortes de romans : les romans héroïques précieux du XVIIe siècle (des histoires d’amour de l’aristocratie dans un cadre idyllique, comme dans L’Astrée d’Honoré d’Urfé) ; des romans picaresques, un genre très prisé jusqu’au XVIIIe (Le Roman comique de Scarron) ; le roman d’analyse psychologique (La Princesse de Clèves racontant une histoire d’amour impossible à la cour du roi Henri II au XVIe siècle) ; le roman philosophique au XVIIIe (La Religieuse ou Jacques le Fataliste de Diderot, La Nouvelle Héloïse de Jean-Jacques Rousseau) ; le roman épistolaire (Les Lettres persanes de Montesquieu, Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos), etc.
Au XIXe siècle, le roman domine la production littéraire. S’y développe le roman historique (Notre-Dame de Paris de Victor Hugo, Les Trois mousquetaires d’Alexandre Dumas), le roman d’aventures (Le Tour du monde en 80 jours de Jules Verne), le roman réaliste (Madame Bovary de Gustave Flaubert, Le Père Goriot de Balzac), le roman feuilleton (Les Mystères de Paris d’Eugène Sue), etc.
Le réalisme est un mouvement littéraire qui se développe à partir de 1848 se réclamant d’œuvres de Stendhal (Le Rouge et le Noir, 1830) ou d’Honoré de Balzac (Le Père Goriot, 1834).
Le réalisme s'inspire d'une réalité que le lecteur connaît et qu'il retrouve dans les romans qu'il lit. En somme, le roman tend un miroir au lecteur et l'invite à réfléchir aux problèmes de son temps. Stendhal écrivait « un roman est un miroir qui se promène sur une grande route ».
La nouvelle et le roman réalistes s'ancrent dans l'histoire et dans un contexte politique et culturel.
Un écrivain réaliste est un observateur très pointu des faits de société, des conditions sociales de son époque. Il s'appuie sur ses propres connaissances du monde qu'il veut décrire. Il se nourrit d'observations précises (en prenant des notes). Il se documente et s'informe et peut même avoir un secrétaire. C’est par exemple le cas d’Émile Zola qui, pour écrire La Bête humaine, rédige un premier ouvrage, l’Ébauche, dans lequel l’auteur esquisse les grandes lignes de l’intrigue ; il se documente (lit Les Chemins de fer de l’ingénieur Pol Lefèvre), entreprend un voyage en locomotive, prend des notes, rédige des fiches sur les personnages et travaille avec Gabriel Thyébaut, lequel rédige une série de notes sur les magistrats ou la justice, lui évitant ainsi de nombreuses lectures.
Si les lieux sont importants dans les récits réalistes, c'est qu'on pense au XIXe siècle que l'environnement influe sur le comportement des êtres humains. Ainsi, les décors de l'action romanesque sont soigneusement décrits parce qu'ils permettent de comprendre les personnages et leur caractère. Ainsi dans Le Père Goriot, la description de la pension Vauquer, par exemple, annonce les pensionnaires ainsi que la propriétaire de la pension. Ou encore dans L’Auberge rouge, la couleur du lieu annonce symboliquement le meurtre qui y sera commis (« Entièrement peinte en rouge, cette auberge produisait un piquant effet dans le paysage »).
Avec le réalisme puis ensuite le naturalisme, il n'y a pas de grands sujets : la littérature peut s'emparer de tous les thèmes. Tout peut être décrit et raconté. Il n'y a pas de bon ou de mauvais sujet. Le réalisme s'oppose à l'esthétique classique qui considérait que le bon (la morale) vient du beau. Or pour les écrivains réalistes, l'art ne doit pas seulement se contenter de décrire ce qui est beau, mais il doit s'intéresser à tous les aspects de l'existence.
On reprochera d’ailleurs beaucoup aux écrivains réalistes puis naturalistes de ne s’intéresser qu’à tout ce qui est bas, vil, méprisable (voir, à ce propos, les caricatures de Zola). Les contes de Maupassant, par exemple, sont pessimistes. L'auteur nous montre une réalité dure (le sacrifice inutile des Loisel dans « La parure »), parfois méchante (la méchanceté des enfants envers Simon ou des paysans envers le gueux) et souvent cruelle (la vengeance de la mère qui dresse un chien à tuer).
Le réalisme s'étend à d’autres arts comme la peinture.
Prenant la suite du réalisme, qui a surtout cherché à décrire minutieusement la réalité, le naturalisme entend faire de la littérature un mode d'expérimentation du monde réel.
Le naturalisme s’oppose alors au surnaturel, à l’irrationnel (pensez au romantisme ou à la littérature fantastique) et se propose d’étudier les lois de la nature.
En fait, le naturalisme, c’est un peu le réalisme + la science.
« Nous sommes simplement des romanciers qui nous appuyons sur les sciences », écrit Émile Zola dans Le Roman expérimental. Et plus loin : « Dès ce jour, la science entre donc dans notre domaine, à nous romanciers, qui sommes à cette heure des analystes de l'homme ».
« L'imagination n'est plus la qualité maîtresse du romancier », conclut Émile Zola.
De même que les scientifiques expérimentent (comme le chimiste qui agit sur la nature et la modifie), de même les romanciers expérimentent en plaçant tel personnage issu de tel milieu, de telle classe sociale, dans telle situation. Le romancier naturaliste analyse alors le comportement de l’homme.
L’observateur choisit son sujet (l’alcoolisme, par exemple) et émet une hypothèse (l’alcoolisme est héréditaire ou est dû à l'influence de l’environnement). La méthode expérimentale repose sur le fait que le romancier « intervient d’une façon directe pour placer son personnage dans des conditions » qui révéleront le mécanisme de sa passion et vérifieront l’hypothèse initiale. « Au bout, il y a la connaissance de l’homme, la connaissance scientifique, dans son action individuelle et sociale.» (Wikipédia)
Dans une étude sur Balzac, Hippolyte Taine qualifie le romancier de « naturaliste » en se basant sur le fait que dans son Avant-propos à La Comédie humaine, Balzac annonce vouloir écrire « l'histoire naturelle » de l'homme (l’histoire naturelle désigne l’étude de la nature, c’est-à-dire de tout ce qui est visible dans le monde naturel : le règne minéral, végétal ou minéral. L’expression « histoire naturelle » cède progressivement sa place aux termes « sciences naturelles », « biologie », « SVT », etc.)
Pour comprendre pourquoi la science joue un rôle jusque dans la littérature, il faut se rappeler qu’en cette fin de XIXe, la science fait des progrès considérables.
Le XIXe est également marqué par une myriade d’inventions techniques dont la plus célèbre est peut-être la mise au point de la machine à vapeur en 1869 par James Watt et qui bouleversera le monde : les transports (en train ou en bateau) qui réduisent les distances mais aussi l’économie en permettant d’acheminer les biens.
Le siècle est marqué par de nombreuses autres inventions comme l’ampoule électrique, le télégraphe, la photographie, le cinématographe, etc.