Lecture analytique du poème « Le Pot de terre et le Pot de fer » de Jean de La Fontaine
Ce poème est une fable. Ce genre poétique a été inventé par Ésope. C’est en général une histoire plus ou moins longue s’achevant sur une moralité. Chez La Fontaine, la fable est en vers (ici des vers de sept syllabes qu’on appelle des heptasyllabes mêlés à des vers de douze syllabes que l’on appelle des alexandrins ; si bien que l’on parle de vers mêlés).
Le texte peut aisément être découpé en quatre parties.
La première est purement narrative (avec ses passés simples « proposa », « excusa », etc.). Cette partie présente les personnages et l’intrigue.
La seconde est un dialogue entre les deux pots (les guillemets, l’alternance des répliques, les tirets, les verbes de parole comme « dit » ou « repartit », le présent en témoignent). Ce dialogue est essentiellement argumentatif puisque le pot de terre donne les raisons de son refus de partir, et le pot de fer tente de le convaincre de venir avec lui.
La troisième partie est constituée d’une série de vers au présent de narration, ce qui rend le récit (qui tend déjà vers la fin) plus vivant. Il y a ainsi une nette accélération du rythme ; l’effet dramatique est renforcé, le pot de terre clopinant vers son destin. Cette petite excursion est racontée en heptasyllabes. Ce vers impair se prête bien au récit de la progression sur trois pieds des pots :
Pot de fer son camarade
Se met droit à ses côtés.
Mes gens s'en vont à trois pieds,
Clopin-clopant comme ils peuvent,
L'un contre l'autre jetés
Au moindre hoquet qu'ils treuvent.
L’aspect comique de ce court voyage est renforcé par les nombreuses allitérations (répétitions de consonnes) peu harmonieuses qui évoquent les chocs des pots entre eux (les sons « tr » ou « k ») ou encore les assonances (répétitions de sons vocaliques « an » ou « on ») qui traduisent les efforts des pots.
En achevant ce récit et en passant à la moralité (c’est la quatrième partie), La Fontaine change de mètre et utilise l’alexandrin qui est un vers plus long, plus harmonieux, un vers pair (aisément découpable en deux parties égales qu’on appelle des hémistiches).
Ne nous associons qu'avecque nos égaux,
Ou bien il nous faudra craindre
Le destin d'un de ces Pots.
Cependant, la fable s’achève avec des heptasyllabes (sur deux vers uniquement), comme si la parole du poète diminuait de volume en même temps que le nombre de syllabes diminue.
La moralité consiste à tirer d’une histoire un enseignement, une leçon. Elle nous montre que cette histoire de pots est une allégorie : ces pots représentent des personnages. Ainsi, le pot de fer représente le puissant, le riche, le pot de terre représente le faible, le pauvre. Selon La Fontaine, les deux ne sauraient vivre ensemble sans danger pour le deuxième.