Relevez dans les extraits ci-dessous tout ce qui exprime l'incertitude du narrateur (vocabulaire, verbe, temps, mode, etc.).
Un frisson me saisit soudain, non pas un frisson de froid, mais un étrange frisson d’angoisse.
Je hâtai le pas, inquiet d’être seul dans ce bois, apeuré sans raison, stupidement, par la profonde solitude. Tout à coup, il me sembla que j’étais suivi, qu’on marchait sur mes talons, tout près, à me toucher. (« Le Horla », Guy de Maupassant)
Or, ayant dormi environ quarante minutes, je rouvris les yeux sans faire un mouvement, réveillé par je ne sais quelle émotion confuse et bizarre. Je ne vis rien d’abord, puis, tout à coup, il me sembla qu’une page du livre resté ouvert sur ma table venait de tourner toute seule. Aucun souffle d’air n’était entré par ma fenêtre. Je fus surpris et j’attendis. Au bout de quatre minutes environ, je vis, je vis, oui, je vis de mes yeux une autre page se soulever et se rabattre sur la précédente, comme si un doigt l’eût feuilletée. Mon fauteuil était vide, semblait vide ; mais je compris qu’il était là, lui assis à ma place et qu’il lisait. D’un bond furieux, d’un bond de bête révoltée, qui va éventrer son dompteur, je traversai ma chambre pour le saisir, pour l’étreindre, pour le tuer !... Mais mon siège, avant que je l’eusse atteint, se renversa comme si on eût fui devant moi... ma table oscilla, ma lampe tomba et s’éteignit, et ma fenêtre se ferma comme si un malfaiteur surpris se fût élancé dans la nuit, en prenant à pleines mains les battants. (« Le Horla », Guy de Maupassant)
Je fis tant de bruit que l’on me mit au cachot.
J’y restai plusieurs heures dans une sorte d’abrutissement ; enfin, les deux amis que j’avais cru voir déjà vinrent me chercher avec une voiture. Je leur racontai tout ce qui s’était passé, mais ils nièrent être venus dans la nuit. Je dînai avec eux assez tranquillement ; mais, à mesure que la nuit approchait, il me sembla que j’avais à redouter l’heure même qui, la veille, avait risqué de m’être fatale. (« Aurélia », Gérard de Nerval)
Il était déjà tard lorsqu’elle pénétra dans l’église ; l’air froid des bas-côtés la glaça ; leur profonde et morne étendue qu’éclairait faiblement le lune à travers une haute fenêtre gothique, réveilla ses craintes superstitieuses ; vit-elle, ou crut-elle voir, pendant qu’elle avançait vers la pierre sépulcrale, une ombre se glisser entre les colonnes ? (Les Mystères du château d’Udlphe, Ann Radcliffe)
Ma vue se porta par hasard vers la table sur laquelle j’avais posé le pied de la princesse Hermonthis. Au lieu d’être immobile comme il convient à un pied embaumé depuis quatre mille ans, il s’agitait, se contractait et sautillait sur les papiers comme une grenouille effarée : on l’aurait cru en contact avec une pile voltaïque [...] (« Le Pied de momie », Théophile Gautier)
Alors je sentis que le fantôme me saisissait et m’entraînait vers le haut. Le désespoir me rendit mes forces.
- Tu n’es pas moi, tu es le diable, lui criai-je, et j’agrippai comme si j’avais des griffes le visage du spectre menaçant ; il me sembla que mes doigts, croyant atteindre les yeux, s’enfonçaient dans de profondes orbites, et il se remit à rire sur un ton strident. (Les Elixirs du diable, E.T.A. Hoffman)